Des violons, des queues de pies, une salle immense, des micros, de la toux et beaucoup de gens très polis, c’est très régulièrement à la Philharmonie, au Parc de la Villette à Paris et c’est tout de suite dans c’est comme la confiture.

Crédits : Podcast proposé par Cultur’easy
Concept de Marion Labbé-Denis
Écriture et Voix de Marion Labbé-Denis
Musique Originale de Lucas Beunèche
Montage & Mixage de Lucas Beunèche
Conseil artistique : Caroline Garnier
Production artistique : Elodie Bedjai

Retranscription de l’épisode La Philharmonie de Paris

Philharmonie, c’est un mot que j’ai mis trente deux ans à orthographier correctement. Philharmonie, trop de “H” d’une part et trop peu d’occasions de l’écrire de l’autre. Pour autant ça m’a toujours un peu intriguée. Et puis qu’est-ce que ça veut dire Philharmonie ? D’après le Larousse, c’est d’une part une association musicale d’amateurs ou de professionnels destinée à donner des concerts. Et d’autre part quand elle porte une majuscule, le nom donné à certaines salles de musique classique. Bien, nous sommes à peu près au clair. Poursuivons.

J’ai découvert récemment la différence entre un orchestre philharmonique, plus moderne au niveau du répertoire et un orchestre symphonique, plus classique toujours en termes de répertoire. Mais sachez qu’il existe aussi d’autres types d’orchestre et notamment les orchestres baroques, de chambre, et harmonique. 

Allez courage

Dans les très très grandes lignes, la musique baroque, c’est une musique principalement composée entre 1600 et 1750. C’est une musique qui se joue avec des instruments à cordes, à vent, des cuivres, des percussions mais aussi et surtout un clavecin. Une musique qui a beaucoup de contraste, donc on va être sur du très aiguë, puis du très grave. C’est du clair-obscur pour la musique. C’est ce qui était joué avant la musique dite “classique” donc avant Mozart et Beethov’, comme disent les avertis.

Historiquement, après la musique baroque vient donc la musique dite classique.

Jouée d’abord par des orchestres symphoniques, composés par des instruments à cordes, des bois, des cuivres et des percussions. Puis au fur et à mesure, on y ajoute des gens et des instruments -je vous la fait courte, on écrira un livre un autre jour. Il y a notamment Berlioz, qui n’est pas seulement le chat des aristochats, mais aussi un compositeur et chef d’orchestre. Qui, d’après les dessins qu’on a fait de lui, était globalement blasé par la vie. Berlioz donc, a ajouté une harpe et donné plus de place à des instruments comme le trombone dans ses compositions. Et donc les orchestres sont composés de plus en plus de musiciens et de plus en plus d’instruments. C’est souvent ces orchestres assez massifs que l’on qualifie de Philharmonique.

Donc c’est à la fois une question de “Comptez-vous”, vous êtes nombreux, on est un orchestre philharmonique. Et une question d’époque, puisque jusqu’au début du romantisme, on est sur de l’orchestre symphonique avec du Beethov’ et du Mozart. Et puis ensuite on est davantage sur de l’orchestre philharmonique avec Schubert, Berlioz, Chopin et Franz Litszt. Après ça, c’est du moderne avec Debussy, Britten, et Bartok par exemple. Et pour finir à partir des années 50 on est sur ce qu’on appelle la musique contemporaine. Avec des gens comme Henri Dutilleux, John Cage ou encore Pierre Boulez qui a d’ailleurs donné son nom à La Grande salle de la Philharmonie de Paris. La Boucle est bouclée.

Personnellement jusqu’à il y a peu de temps, pour moi Beethoven c’était d’abord un Saint Bernard. Comme quoi tout arrive.

Tout ça pour introduire le fait que : Je suis allée à un concert de l’Orchestre national d’Île de France à la Philharmonie de Paris. Oui, je vis dangereusement, je tente des choses.

La Philharmonie de Paris a été conçue par Jean Nouvel. L’architecte de l’Institut du Monde Arabe, de La Fondation Cartier, du Palais de Justice de Nantes, du Louvre – Abu Dhabi et de La Tour Agbar à Barcelone pour ne citer qu’eux. Je ne détaille pas, parce que c’est pas le sujet. Mais Jean Nouvel, c’est une pointure de l’architecture et il travaille beaucoup avec le verre et l’acier. C’est lui donc, qui a conçu “La Philha”. 

Construite à partir de 2010 et inaugurée en 2015. Ce bâtiment se trouve dans le parc de la Villette. On dit que Jean Nouvel a envisagé la Philharmonie comme une colline surplombant le parc de La Villette. Au delà de son architecture impressionnante, l’acoustique de la salle fait figure de modèle. La salle en elle-même est adaptable et peut être modulée de 17 façons différentes. On peut passer de 2400 places assises à 3700 places debout. Et à priori de partout, le son est bon et le ciel est bleu. D’ailleurs on dit que quelle que soit la disposition de la salle, même le spectateur le plus éloigné, ne peut se trouver à plus d’une trentaine de mètres du chef d’orchestre.

C’était la première fois que je mettais les pieds dans ce bâtiment. Ma première impression c’était de me dire, c’est si grand ! Et puis quand on arrive du métro porte de Pantin, ce petit chemin éclairé de rouge, cette place avec la grande halle de la Villette, c’est superbe.

On se doute que dans ce genre d’endroit, il y a des habitués. 

Des gens qui ne sont pas là pour rigoler. Et puis il y en a d’autres, qui jouent allègrement au 2048 en attendant que ça démarre. Peut-être même pendant va savoir, je ne l’ai pas surveillé moi ce monsieur.

De manière générale, je trouve que les gens qui sont seuls dans ce type d’événement, ont toujours l’air d’être des pros. Alors, parfois quand je me retrouve seule moi aussi, notamment parce qu’on m’a posé un petit animal, comme c’était le cas ce soir là. Je sors un cahier, un stylo et je me console en me disant que moi aussi peut-être que j’ai l’air de savoir de quoi je parle. Je prends des notes, en écrivant suffisamment mal pour que personne ne puisse lire par-dessus mon épaule. Après ça va, pour moi, c’est pas dur, dans la mesure où même quand je m’applique, j’ai du mal à me relire. Mais enfin, quand on arrive pour s’installer dans la salle, les musiciens arrivent en même temps que nous. Et ils s’échauffent genre chacun dans leur coin.

Je me suis demandé : “Attends, c’est quoi les fils qui pendouillent ? Des micros ?” Oui, ce sont des micros. Quand il y en a plusieurs des micros parmi les musiciens en général ça veut dire que c’est REC comme disent les ingés sons. Alors, la prochaine fois que vous allez voir un concert et que vous voyez des petits fils et plusieurs micros n’hésitez pas à glisser à l’oreille de vos camarades “À mon avis c’est REC ce soir”.

Après on a démarré, oui, je dis on, alors que j’ai rien fait du tout personnellement.

Le chef d’orchestre est arrivé. Il a salué le premier violon. Et c’est au moment où le premier violon s’est levé que j’ai réalisé que tout le monde était en queue de pie.

Le chef d’orchestre, Case Scaglione, a présenté un peu le programme de cette soirée. Et on a commencé par une compositrice “vivante”, c’est bien de le préciser. Il s’agit d’Anna Clyne, qui a composé This Midnight Hour. Un “mouvement symphonique de 12 minutes” inspiré par de deux poèmes de Jimenez et Baudelaire. C’est très joli, j’ai eu l’impression d’avoir vu un film d’une heure trente en douze minutes. Avec des émotions : de la peur, de la beauté, du suspense, de la douceur et de la valse, des chutes vertigineuses et des jump scares.

C’est vrai quand on écoute ce “mouvement” on voit des cascades, des orages, et puis des éclaircies furtives mais du drame aussi. Je me suis dit : “Quand même, c’est fort de faire en sorte que tout le monde soit dans les temps. Et puis quand tu fais partie de l’orchestre, qu’est-ce que tu regardes ? Ta partition, le chef d’orchestre ? Le chef d’orchestre, ta partition ? Les deux à la fois ? Je ne sais pas”.

À la fin de ce premier passage, pendant les applaudissements, le chef d’orchestre il a fait un mouvement destiné aux musiciens. Genre tout le monde debout, que la fête commence. Et là, le jeune homme qui jouait à 2048 au tout début, il a esquissé un mouvement pour se lever. Avant de comprendre que c’était pas à lui que le chef d’orchestre s’adressait. J’ai un peu ri d’autant que j’ai failli faire pareil.

Après Anna Clyne, il y avait au programme un concerto pour violon de Benjamin Britten.

Un concerto réputé injouable pour la soliste au violon. C’est un morceau qui a été composé en 1938, il est assez grinçant ce morceau. Je ne sais pas comment dire, mais il a l’air gentil et en fait non. Il y a des cordes pincées qui rendent le tout très menaçant. Visuellement, c’est impressionnant, comme une chorégraphie avec des archets. Il y a un moment le violon sortait de ces sons. Je ne savais même pas que ça pouvait faire ce bruit là. 

À la fin de ce fameux concerto pour violon injouable, et joué par Simone Lamsma, une violoniste néerlandaise de 38 ans, il y a eu une faille spacio-temporelle. Un moment de temps suspendu. Le chef d’orchestre avait les mains en l’air. L’archet de la violoniste touchait encore les cordes du violon, mais plus personne ne bougeait. Plus un bruit, plus un mouvement pendant bien 3 à 5 secondes. C’était lunaire, j’avais l’impression d’avoir phasé. On a tous flotté comme ça, jusqu’à ce qu’un technicien avec une jolie coupe mulet vienne retirer des éléments de la scène.

Je me suis dit aussi, c’est marrant, y a toujours des gens qui toussent dans ce genre d’événement. On dirait qu’on joue au roi du silence et qu’il y a des gens qui ne veulent pas gagner. Ce soir-là, il y avait beaucoup de gens qui avaient la toux grasse. Oui, bah oui, c’est dégueu, mais c’est vrai, je dénonce, je suis pas médecin mais il y avait de la bronchite dans l’air.

On a terminé la soirée sur la Symphonie n°6 en fa majeur de Beethoven.

Dite “Pastorale” aka “Éveil d’impressions agréables en arrivant à la campagne”. Je ne vais pas réinventer l’eau chaude, Beethoven, c’est beau. Ça fait plaisir, et ça donne un peu envie de s’allonger dans l’herbe et de gambader dans des prés.

En écoutant ça, je me suis demandé : est-ce que parfois les concerts sans paroles ce serait pas un peu comme un livre sans images ? Au début on est un peu perdus parce qu’on a pas l’habitude. mais on finit par se les faire nous même les images.

J’ai eu un petit moment d’absence. Quand j’ai lu que le chef principal de l’Orchestre national d’Île de France, Case Scaglione, l’était depuis 2019 et qu’il venait d’être renouvelé jusqu’en 2026. 2026, ça me semblait être dans dix ans, je me suis dit : “Dis donc ils rigolent pas avec les nominations”. Jusqu’à ce que je réalise qu’on était déjà en 2023. Il n’y a rien à faire, le temps qui passe, ça ne veut pas rentrer…

Mais je m’étale, je vous conseille La Philharmonie de Paris si

Ca vous intrigue, que vous voyez à quoi ça ressemble la Philha, de dehors. Mais que vous voudriez savoir un peu ce que ça dit dedans. Si vous êtes plutôt Jazz, vous pouvez assister à un concert de Stacey Kent au mois de juin. Et si vous êtes plutôt autre chose, franchement allez faire un tour sur le site de la Philharmonie. Ils ont une programmation très riche. Il y en a vraiment pour tous les goûts. Du hip hop à l’ultrascore. Mais il y a aussi des spectacles, de l’Opéra, de la danse, du funk et puis des expositions aussi. Il y a même des concerts pour les babies. Alors allez-y !

Bisette,

PS : Ah et à force de me renseigner, j’apprends des trucs

La dernière fois j’étais chez des copains. Ils avaient mis une radio de musique classique. Oui, on est des gens comme ça oui. On a remplacé Willy Denzey par Radio classique, tout fout le camp. Bref, il y avait du classique en fond, parce qu’on bossait tous un peu. Et là j’ai entendu les premières notes d’un morceau. Et je me suis exclamée : “Oh c’est Tchaïkovsky, le lac des petits oiseaux”. J’avais à la fois envie de m’auto high five et dans le même temps un peu envie de me gifler.

A très vite pour un nouvel épisode !

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