Grâce à la construction d’une renommée internationale, des rives de la Saône jusqu’aux confins du Japon, Paul Bocuse, le « Pape de la Gastronomie », aura œuvré toute sa vie afin que son nom continue de briller.

« Polo » des bords de Saône

Chez Bocuse, on est cuisinier depuis 1765 ! Michel Bocuse, quinquisaïeul de Paul, meunier à Collonges-au-Mont d’Or, à côté de Lyon, a commencé l’histoire culinaire de la famille grâce à son épouse qui régalaient les paysans des environs avec des petites fritures et de la cochonnaille. Georges, père de Paul, rachète le restaurant familial à ses beaux-parents, le lieu de naissance de Paul Bocuse en 1926.

Le père de Paul Bocuse lui a appris à pêcher et à chasser dans les prés et les bois environnants. Le petit Paul n’a pas une grande passion pour l’école, préférant aller braconner du poisson ou du petit gibier à proximité pour l’offrir à son instituteur ou au curé pour s’excuser d’avoir raté les cours ou la messe ! Facétieux, le grand Paul dira plus tard

J’ai deux bacs : le bac d’eau chaude et le bac d’eau froide !

Paul Bocuse
Paul Bocuse, Auberge de Collonges, mai 2008 © Elisabeth Rull
Paul Bocuse, Auberge de Collonges, mai 2008 © Elisabeth Rull

L’apprentissage de Paul Bocuse

De retour à Collonges en 1943 après avoir été blessé près du cœur et sauvé par les Américains, il est décoré de la Croix de guerre. Il épouse Raymonde et décide de devenir cuisinier. Il enfourche sa bicyclette et parcours les vingt-six kilomètres de lacets qui séparent Collonges du Col de la Luère (712 mètres d’altitude) où la Mère Brazier, trois étoiles au Michelin, l’accueille en misant sur ce jeune homme courageux qui ne rechigne pas à la tâche.

Georges Bocuse écrit à Fernand Point, dont le restaurant « La Pyramide » à Vienne est auréolé du titre « de plus grand restaurant du monde », pour qu’il prenne Paul en stage. Celui-ci lui répond par la négative dans une lettre très courtoise car les affaires ne sont pas florissantes. Paul Bocuse décide de se faire embaucher sans révéler son identité. Sa force de travail et de son esprit de bonne camaraderie payent, Point devient son mentor.

Un passage à Paris par deux tables triplement étoilées (Lapérouse et Lucas Carton) et il est de retour à Collonges. Paul Bocuse y doit son premier article de presse à ses talents de sauveteurs. Au gré des ans il a réalisé seize sauvetages de baigneurs dans la Saône. Mais bientôt, la presse ne cessera de parler de Paul Bocuse pour sa cuisine…

 Paul Bocuse devant son restaurant lors d’une crue de la Saône © archives JFM
Paul Bocuse devant son restaurant lors d’une crue de la Saône © archives JFM

La consécration

Bocuse obtient sa 1ère étoile (1958) puis la 2e (1960), le titre de Meilleur Ouvrier de France (1961). L’obtention de sa 3e étoile (1965) finit de légitimer sa position. En 1975, sa nomination au titre de chevalier de la Légion d’honneur par Valéry Giscard d’Estaing lui donne l’occasion de créer sa célèbre soupe aux truffes VGE.

Soupe de truffes V.G.E. de Paul Bocuse
Soupe de truffes V.G.E. de Paul Bocuse

Dans les années 70, avec une douzaine de copains chefs (dont Charles Barrier, Alain Chapel, Michel Guérard, Jean et Pierre Troisgros, Louis Outhier ou Roger Vergé entre autres), Paul Bocuse est le maître à penser de la Nouvelle Cuisine. Grâce à un pôle de restauration à Disney World en Floride (1982), le concours du Bocuse d’or (1987), la prestigieuse école « L’institut Bocuse » à Ecully dans l’ouest lyonnais (1990), 4 brasseries aux noms des points cardinaux (entre 1994 et 2003) à Lyon, 8 restaurants au Japon (2007), P. Bocuse a instauré un modèle de chef très en lien avec les stratégies de communication actuelles. Certaines tendances contemporaines, comme la bistronomie, ont hérité des valeurs défendues par M. Paul.

Paul Bocuse décède en 2018 dans la maison dans laquelle il est né

Il aura bâti un empire autour d’une cuisine de terroir, puisant ses racines dans la simplicité et la générosité. Pendant plus de soixante ans. Les superlatifs sont nombreux (« Cuisinier du siècle », « Empereur des Gueules ») pour évoquer la personnalité de ce cuisinier. De Collonges-au-Mont d’Or à Orlando (États-Unis), il aura ainsi gravi une à une les marches de la notoriété. Ambassadeur de la cuisine lyonnaise et de la gastronomie française à travers le monde, son goût pour la transmission et la communication lui a assuré une renommée internationale. Aujourd’hui, après le retrait de la troisième étoile par le Guide Michelin dans l’édition 2020, l’équipage de M. Paul, au sein de l’Auberge historique à Collonges, a à cœur de perpétuer la « tradition en mouvement ».

Paul Bocuse et Roger Vergé, 25e anniversaire de Disneyworld, février 1996 © Gamma-Rapho
Paul Bocuse et Roger Vergé, 25e anniversaire de Disneyworld, février 1996 © Gamma-Rapho

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Par Solenne Livolsi,

Diplômée en histoire de l'art et à Sciences-po Lyon, Solenne a travaillé aux quatre coins de la France ainsi qu’à l'étranger dans plusieurs structures culturelles. Commissaire d’exposition, elle crée un dialogue entre les artistes et les territoires. Spécialisée en art & food, Solenne est à l'affût de bons plans à partager.

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