Des roulades, du piano, de la mélancolie et une pointe de jalousie. Alexandra Streliski, c’est chez tous les bons disquaires, sur les plateformes de streaming et tout de suite dans C’est comme la confiture.

Crédits : Podcast proposé par Cultur’easy
Concept de Marion Labbé-Denis
Écriture et Voix de Marion Labbé-Denis
Musique Originale de Lucas Beunèche
Montage & Mixage de Lucas Beunèche
Conseil artistique : Caroline Garnier
Production artistique : Elodie Bedjai

Retranscription de l’épisode : « Alexandra Streliski ou le piano dans la peau »

Il y a quelques années, j’ai découvert une compositrice de piano qui a révolutionné mes nostalgies : Alexandra Streliski. Je ne sais pas pourquoi j’ai toujours envie de rajouter ou d’inverser des consonnes dans son nom de famille. Maintenant que j’y pense j’ai peut-être un problème avec les noms de familles de façon générale en fait.

Bref, je l’ai découverte grâce à une compagnie de cirque contemporain bordelaise qui s’appelle le Cirque Le Roux. Et oui, d’ordinaire on a tendance à dire et à penser que les meilleures compagnies de cirque sont canadiennes. Mais il faut croire que la Nouvelle-Aquitaine n’est pas en reste. À Bordeaux, on passe beaucoup de temps à débattre de la nomenclature d’une viennoiserie dont je tairais le nom. Mais on fait aussi du cirque et quel cirque ! Je les ai découverts avec leur deuxième création qui s’appelle La Nuit du Cerf. C’est un spectacle de haute voltige. Il mêle habilement une esthétique cinéma des années 70 délicieusement rétro, de l’humour, des acrobaties impressionnantes et du patin à roulettes.

Ils font de ces trucs de dingues

Le moins qu’on puisse dire c’est que quand ils font une pyramide ça a plus de gueule que nos rendus de cycles acrosport au lycée. Vous me direz c’est normal, c’est quand même un métier. Cela dit, comme dirait ma mère “Rien ne résiste à l’entraînement”. Enfin je dis ça. Mais moi à deux ans j’expliquais à un vrai prof de gym comment faire des roulades dans mon salon. Ça, c’est mon petit côté tiran.

Il faisait une roulade et il me demandait avec une patience d’adulte : “C’est comme ça ?”. Moi je répondais : “Non, regarde, je te montre”. Là, ni une ni deux, je me laissais tomber par terre la tête la première sans rien rouler du tout. Je me relevais fière en disant : “Voilà, c’est comme ça qu’on fait, vas-y essaie de faire pareil”. Ce qui ne serait pas problématique si j’avais évolué. Mais j’en suis toujours au niveau zéro de la roulade.

Ils font des choses incroyables. Leur façon de s’élancer dans les airs, de se rattraper les uns les autres. Moi ça me fait toujours quelque chose. Je ne sais pas, mon imagination fertile interprète ça comme un message du divin qui dirait : “Tu vois tu peux y aller, on peut tous y aller, et on va se rattraper les uns les autres et ça va être formidable”. Et ça c’est mon petit côté Olaf et Oui-Oui à Woodstock. Mais enfin ce n’est pas le sujet. Le sujet comme je vous le disais au départ. J’ai digressé tout ce que j’ai pu pour en arriver là. C’est que la bande son de ce spectacle est magnifique. Et qu’ils m’ont permis de découvrir cette compositrice de talent qu’est Alexandra Streliski.

C’est une pianiste et compositrice originaire de Montréal

Franchement Montréal, ça a l’air d’être aussi le berceau de la civilisation, presqu’autant que la Bretagne. Alexandra Streliski, -je me dis que plus je le répète plus ça deviendra naturel-. Elle fait ce qu’on appelle de la musique minimaliste, ou néoclassique ou classique contemporaine. C’est genre du classique, mais nouveau. Personne ne sait trop ce que ça signifie. Mais disons que pour les gens qui comme moi, n’ont pas l’oreille absolue, ça fait penser à Erick Satie en plus pop. Parce que ça a été écrit aujourd’hui.

Elle a démarré sa carrière en travaillant pour la publicité. Puis elle s’est résolue à se consacrer entièrement à ses compositions. Son premier album Pianoscope a été produit en indépendant. C’est à la suite de cet album qu’elle a été approchée par le réalisateur Jean-Marc Vallée. Il a utilisé certaines de ses compositions dans son film Dallas Buyers Club. Mais aussi dans plusieurs séries qu’il a réalisées comme Big Little Lies et Sharp Objects, que je vous recommande chaudement.Son deuxième album, Inscape présente un petit cosmonaute sur la pochette. Et ce titre ! Mes aïeux : Escape – Inscape, vous l’avez ? S’échapper à l’intérieur de soi, c’est joli non ?

Bon, officiellement, ils disent que c’est la contraction de Inner et de landscape, qui veut dire Paysage

Ce serait donc le paysage de l’intérieur de soi, mais je préfère ma version. Bon ce qu’il faut savoir, c’est qu’au moment où elle a composé Inscape, Alexandra Streliski était en dépression. Comme quoi le mythe de l’artiste maudit a encore de beaux jours devant lui. Malgré tout, ce deuxième album est assez lumineux. Contrairement au premier, il a été produit par une maison de disques de Montréal, Secret City Reccords. Pas si secret pourtant puisqu’il a fait 110 millions d’écoutes et été vendu à 97.000 exemplaires.

Alexandra Streliski a obtenu trois Prix Félix

Et là vous me direz, mais qu’est-ce qu’un prix Félix ? C’est un prix pour l’excellence décerné par l’ADISQ, l’Association Québécoise de l’Industrie du Disque, du Spectacle et de la Vidéo. Et les prix qui sont remis, ont été nommés en hommage à Félix Leclerc. Je ne connaissais pas du tout, mais dont je vous conseille le titre La complainte du phoque en Alaska. C’est son top titre et c’est l’histoire d’un phoque qui se plaint en Alaska.

Enfin, revenons une fois de plus à l’objet principal : cet épisode.

La musique d’Alexandra Streliski, ça fait un peu comme des petites balades à la campagne sous la pluie

Mais dans les oreilles. Ça sent l’herbe fraîchement coupée et ça donne envie de cueillir des fleurs et de gambader. Parce que je vous rappelle qu’en tant qu’adultes, on ne gambade plus qu’à de très rares occasions. D’ailleurs je me demande depuis combien de temps exactement je n’ai pas gambadé. Gambader, c’est “Faire des bonds joyeux et spontanés” et à mon avis ça fait quelques années. Il serait temps que je m’y remette. C’est pas parce que j’ai arrêté les roulades que je ne peux pas me permettre quelques fantaisies à l’occasion. Réellement, certains de ses titres donnent des frissons, le vertige, peut-être que j’exagère, mais je ne pense pas. 

Moi quand j’écoute sa musique il y a ma vie, passée, présente et future. Elle défile devant mes yeux en accéléré comme dans un téléfilm du mercredi après-midi. À tout moment je passe quelques scènes en sépia ou avec un filtre Mayfair pour plus d’emphase. Le film serait peut-être moyen, mais la bande son saluée par la critique c’est certain.

Je ne sais pas pourquoi j’ai autant accroché avec sa musique. C’est peut-être parce que j’ai toujours aimé le piano

Même après avoir passé quatre ans de cours hebdomadaires sur le livret pour débutants. Je ne nourris pas de ressentiments pour cet instrument, pourtant il y aurait eu de quoi. Mais je suis toujours fascinée par les gens qui arrivent non seulement à tapoter avec leurs doigts sur des touches en tapant du pied sur une autre. Mais aussi par ceux qui inventent des phrases avec. Des phrases qui touchent d’autres gens qu’ils n’ont pourtant jamais vu.

J’ai eu un immense coup de cœur pour Burnout fugue, qui est un de mes titres préférés. C’est quand même marrant de voir à quel point ça s’inscrit dans son époque. Même au niveau du nom des morceaux, Burnout, clairement c’est pas Erick Satie qui aurait intitulé ses morceaux Burnoutpédie N°4. Mais je me dis que c’est bien aussi de ne pas décrédibiliser les maux contemporains. Face à ce qu’on considère aujourd’hui comme des monuments historiques. C’est aussi ça, la force du néoclassique peut-être. D’inscrire nos émotions et problématiques dans une ligne qui n’est pas moins digne ou réussie que celle des Satie.

Le dernier titre qu’elle a sorti s’appelle Élégie

Je ne savais même pas ce que ça voulait dire. Eh bien, sachez que c’est un poème lyrique exprimant une plainte douloureuse et des sentiments mélancoliques. Et effectivement… C’est un titre sur lequel le piano est accompagné par un violon. Et je ne saurais dire pourquoi exactement, ça doit être une question à poser à des professionnels de la musique, des notes et du solfège. Mais ce morceau me brise le cœur. Vraiment je crois que si un jour je l’écoute alors que je suis fatiguée, anxieuse. Ou qu’il y a encore un incident d’exploitation sur la ligne 12 un mercredi soir en heure de pointe, je pense que je pourrais pleurer. Un peu comme quand j’écoute la bande son de La Leçon de piano de Jane Campion.

Mais je m’étale.

Je vous conseille d’écouter Alexandra Streliski

Si vous aimez Yann Tiersen, Philip Glass, Michael Nyman et Sofiane Pamart. Même si d’aucuns diront qu’il reprend des airs que d’autres ont déjà composés avant lui. Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme. Et puis, je vous le conseille aussi, parce que d’après un ouvrage du Centre de documentation de la musique contemporaine publié en 2019. Seules 10% des compositeur.ice.s sont des femmes. Et à mon avis, plus elles seront écoutées, plus elles seront visibles. Plus elles seront visibles, plus elles seront nombreuses.

Je vous conseille de l’écouter quand vous serez un brin nostalgique. Que vous aurez besoin de concentration. Ou que vous voudrez marquer le premier jour du reste de votre vie parce que vous aurez pris une décision importante. Qu’il s’agisse de révolutionner l’industrie aéronautique ou de changer la litière du chat.

Bisette,

PS : Ah et si jamais vous souhaitez voir ou revoir le spectacle du Cirque Le Roux, La Nuit du Cerf.

Sachez qu’ils seront le 10 mars à Montélimar, le 25 mars à Vierzon et même à Thonon-les-Bains le 3 mars prochain. J’insiste sur Thonon-les-Bains, parce que c’est là que vivent les producteurs de ce podcast. Coucou Thonon-les-Bains !

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