Des sculptures, de vrais cheveux, de la cire et des gens tous nus, mais pas que. Hyperréalisme, Ceci n’est pas un corps c’est jusqu’au 5 mars au Musée Maillol et c’est tout de suite dans C’est comme la confiture.

Crédits : Podcast proposé par Cultur’easy
Concept de Marion Labbé-Denis
Écriture et Voix de Marion Labbé-Denis
Musique Originale de Lucas Beunèche
Montage & Mixage de Lucas Beunèche
Conseil artistique : Caroline Garnier
Production artistique : Elodie Bedjai

Retranscription de l’épisode Hyperréalisme

Je vous pose le contexte. On est samedi matin, et je patiente devant le 59 de la rue Grenelle. La veille il y a eu une visite naturiste de l’exposition que je m’apprête à découvrir. Franchement, quand j’ai entendu parler de ça, j’ai eu super envie d’y aller. 

Mais, au dernier moment… J’ai renoncé. Je n’étais pas fière. Il y avait trop de questions sans réponses. Est-ce qu’il y a des vestiaires ? Est-ce qu’on est pieds nus, est-ce qu’on garde nos chaussettes ? Va-t-il faire froid ? Est-ce qu’on a nos téléphones ? Est-ce qu’on va photographier nos croupes ? Ça m’a empêché de me lancer à corps tout nu, dans cette aventure. 

Bref, j’ai donc décidé de sortir de ma zone de confort un autre jour. Et de remettre au lendemain ma visite -habillée- de l’exposition. Cela dit, les trois créneaux de visites dénudées ont eu un franc succès. Organisés par l’Association des Nudistes de Paris et la Fédération Française de Naturisme, 700 inscriptions ! Chapeau.

L’hyperréalisme, c’est un courant artistique qui vise à imiter le réel à l’identique. 

Dans les années 60 Duane Hanson et John DeAndrea ont réalisé des sculptures extrêmement réalistes d’êtres humains. Cette pratique a fortement influencé l’évolution de la sculpture par la suite. L’expo présente six espaces liés à des thématiques différentes. La première dévoile des Répliques humaines, et des scènes de vies. La seconde présente des sculptures monochromes et la troisième des morceaux de corps fragmentés. 

Franchement c’est bluffant. Je savais pourtant ce que j’allais voir. J’étais au courant. J’ai vu les affiches. Au début de l’exposition, j’ai vu une fille la tête dans son pull qui s’appuyait contre un mur. Et je me suis dit “bah, qu’est-ce qu’elle a la dame ?” Et bah la dame c’est une sculpture qui s’appelle Caroline, et qui a été faite par Daniel Firman. Là, j’étais un peu vexée de m’être fait avoir. Et Caroline étant habillée je me suis dit “Tiens bah tu vois ça ça me serait pas arrivée si tout le monde avait été tout nu.”

Dans la deuxième partie, celle des monochromes, il y a un buste de femme de Fabio Viale, un buste en polystyrène.

Là moi je me dis : “Wah mais le mec est trop fort, sculpter du polystyrène ? Mais avec quoi, comment il a fait ?” Je m’approche du cartel, cette petite étiquette magique. Là je réalise que ce buste est en fait, en marbre. Bon, deuxième vexation. À priori, je ne sais pas faire la différence entre du polystyrène et du marbre. Enfin soit, ça, soit, clairement Fabio, c’est pas le dernier trou de la flûte. 

Cette exposition, elle parle de la vulnérabilité de nos corps. De la perception qu’on en a, de ce que l’on voit ou non, de leur matérialité. Mais aussi, de façon plus générale, de la capacité de notre cerveau à rationaliser ce que l’on voit, avant de l’avoir éprouvé. 

En passant à la troisième partie sur le rapport aux corps.

Aux détails du corps, et à des morceaux choisis de celui-ci, je me suis dit : “C’est quand même fou. Voir à quel point les artistes qui nous reproduisent, façonnent nos répliques avec tant d’attention. Au moindre poil, à la moindre ride, à la moindre tâche de peau. Quand dans la réalité, on passe notre temps à tenter de lutter contre. À les diluer, à gommer nos aspérités et dissimuler toutes ces particularités.

A la fin de cette première partie du parcours, une sculptrice explique ses débuts. Au départ, quand elle avait voulu se mettre à la sculpture, elle s’était blessée. En taillant je ne sais plus très bien quoi, du marbre ou du polystyrène sans doute. Et qu’elle s’était dit “Ouh là, c’est pas pour moi cette affaire. Trop dangereux, trop d’investissement. J’ai pas le temps pour ça’”. Et puis que plus tard, elle avait découvert qu’on pouvait sculpter en faisant des moulages de corps. Là, elle avait dit “Ah oui, ça d’accord, ça peut devenir intéressant !” J’ai trouvé ça chouette d’en parler aussi ouvertement. Du fait qu’on n’est pas nécessairement venus là pour souffrir non plus. 

Après ça, l’expo continue au milieu des œuvres de Maillol, mais une fois que j’ai eu fait mon petit tour, impossible de trouver la suite.

Je voyais bien pourtant sur mon petit livret qu’il y avait une suite, une partie 4, 5, 6. Mais je ne retrouvais pas le chemin ! Je me disais, mais il est où le 4 de mon petit livret, enfin ?!

Alors, quand vous arrivez au 2ème étage et que vous n’avez pas fait le 4, “No panicking, I repeat, no panicking”. Il suffit de redescendre au rez-de-chaussée et ça continue encore et encore, c’était que le début, d’accord, d’accord.

La quatrième partie est consacrée aux “Jeux de taille”.

Il y a une statue de Ron Mueck. Un artiste australien qui représente un homme adulte mais en taille 12 mois. Je veux dire proportionné mais petit et surtout très réaliste. Complètement recroquevillé sur lui-même dans un drap. Il est écrit dans le guide, qu’il s’agit d’une œuvre dressant “un portrait psychologique de la solitude”. 

Moi je m’approche pour regarder de plus près. Cette fois, pour ne pas me faire avoir comme avec le polystyrène. Et impressionnée, je me dis “Oh là là, mais c’est dingue à quel point c’est réaliste ! Même le tissu, on dirait un vrai tissu, c’est fou.” Satisfaite, je prends un air concentré, je lis sur le cartel, “Gna gna gna, silicone, fibre de verre, latex, tissu…” Ouais, bah tu m’étonnes qu’il ait l’air réaliste. Je suis vraiment d’une naïveté sans faille, toujours un peu à côté du vélo.

Dans une vidéo de cette quatrième partie, un artiste, Sam Jinks, explique qu’il s’inspire de personnes réelles.

De son entourage ou d’inconnus qu’il a sollicités dans la rue. Il dit que les gens sont toujours surpris du résultat. Parce qu’on a jamais l’occasion de se voir en 3D en réalité, cette perception là nous échappe. Je me suis dit, c’est pas faux. 

Au fond, on ne se perçoit pas de l’extérieur. On voit nos mains, nos genoux, nos pieds, en 3D, mais jamais le reste. Parce qu’on le regarde à travers un miroir, qui lui, nous renvoie un reflet. Et que notre corps, on est coincé dedans. On ne perçoit donc que des fragments. On ne se perçoit pas dans la largeur. Les autres, oui, puisqu’on leur tourne autour. On les voit bouger dans le même espace que nous. Mais nous, autant on se voit mettre un pied devant l’autre, autant on ne se verra jamais comme les autres nous voient. Et inversement.

Après les jeux de taille, il y a des œuvres qui montrent des réalités difformes.

Des hommes et des femmes mi-hommes, mi-femmes, mi-animaux. Des évolutions qui pourraient avoir lieu dans un monde parallèle ou dans le nôtre d’ailleurs. C’est très proche de la science-fiction. 

Je crois que j’ai moins accroché avec cette partie, parce que j’ai tendance à trouver qu’elle est sous-exploitée. Et qu’elle aurait sa place toute seule. Mais que là, comme ça, elle donne un peu l’impression d’un cheveu sur la soupe. Ce que j’ai trouvé dommage. Je suis restée sur ma faim.

L’expo se termine par des propositions liées à l’évolution de la sculpture Hyperréaliste.

Que l’on pourrait éventuellement faire bouger par le biais de la performance ou de la vidéo. Mais je ne vous en dis pas plus. Je vous laisserai découvrir tout ça.

Je ne vais pas vous mentir, j’ai eu des frissons

L’éclairage de l’expo est dingue. On est plongés dans le noir la plupart du temps. Et les œuvres sont éclairées comme des stars du cinéma des années 30. Ça rend hyper bien. Et je pense que même avec un appareil photo de seconde zone, vous aurez l’impression d’être le Philippe Etchebest de la photographie. Que dis-je, le Francis Cabrel de la pellicule, la Marie Curie de la prise de vue. 

Je me suis quand même demandé, comment, mais est-ce qu’ils arrivent à transporter des œuvres pareilles? Ça a l’air si fragile. Je sais bien qu’il y a des gens dont c’est le métier. Mais je trouve ça toujours fou ! D’autant que cette expo a déjà pas mal voyagé. De l’Espagne à la Belgique, en passant par l’Australie et les Pays-Bas.

Franchement, je me demande ce qui nous fascine autant dans le fait de voir de vrais-faux Nous.

Est-ce qu’on est à ce point égocentré qu’on aime pouvoir se reproduire à l’identique à l’infini ? Est-ce qu’on a besoin de voir des critiques sociales ? Des politiques inanimées pour s’autoriser à les penser sans avoir l’impression de se mettre en danger ? Je ne sais pas, je me demande.

Mais je m’étale. Je vous le conseille si vous aimez les jeux de perception, les trompes l’œil et vous laisser surprendre. Il y a plein de choses variées. Que ce soit au niveau des matériaux, des courants, ou des thématiques abordées. C’est très riche, et il y en a pour tout le monde. J’ai beaucoup aimé. Ça pose des tas de questions sans pour autant donner de réponses toutes faites. Et puis, contrairement aux rétrospectives d’un seul artiste, dans lesquelles on peut parfois se dire : “Bon, ça ne me touche pas, ça ne me touche pas. Point.” Là, il y a tellement d’artistes différents que ça m’étonnerait fort qu’il n’y en ait pas un seul qui vous marque. Vraiment, je vous le conseille. Ça vaut le détour et il me tarde d’avoir vos retours.

Bisette

PS : Ah ! Et pour la petite histoire

Le titre de l’expo est une référence au tableau de Magritte qui représente une pipe. Et qui s’appelle à juste titre Ceci n’est pas une pipe. Bon, eh bien, là, on voit des corps, mais ce ne sont pas des corps. CQFD. Je n’ai jamais su comment utiliser CQFD mais je crois que là, j’ai le droit.

L'équipe Podcast de Cultur'easy s'emploie à créer toujours plus de contenus immersifs pour nos utilisateurs. Une identité et des objectifs forts : l'émotion et faire vivre la culture pour la partager au plus grand nombre.

Commenter cet article


The reCAPTCHA verification period has expired. Please reload the page.