Depuis les premières civilisations, la question de la religion est centrale. « Et l’homme créa les dieux » de 368 pages, publié en janvier 2021 par le dessinateur Béhé, est un roman graphique qui permet une mise en image audacieuse d’un sujet à la symbolique forte et universelle. Un coup de projecteur sur ce lien indéfectible qui unit les hommes à la religion par la médiation d’un ouvrage imagé qui tente de résoudre des questions existentielles dans une démarche précise et réaliste.

UNE APPROCHE DOCUMENTAIRE ET IMAGÉE ADAPTÉE D’UN ESSAI DE PASCAL BOYER

Couverture du roman graphique Et l'homme créa les dieux
Couverture du roman graphique Et l’homme créa les dieux

La préface de Pascal Boyer introduit avec brio ce roman graphique adapté de son essai éponyme sur la religion « Et l’homme créa les Dieux ». Elle donne le ton et le haut degré précision de cette version dessinée.

Béhé a fait l’impossible ou le presque impossible, à répétition et sans faire de manières. Car l’illustration est si parfaitement appropriée à ces sujets difficiles, qu’il est facile d’oublier qu’il a fallu tant de recherche pour y parvenir. C’est ce que Joseph Béhé, sans le dire (et peut être sans le savoir) est, un disciple de Flaubert – il pense que le créateur, le dessinateur en l’occurrence, doit être dans son œuvre comme Dieu dans le monde, partout présent et visible nulle part.

Pascal Boyer

Une comparaison avec Flaubert qui montre que ce roman graphique a nécessité une recherche documentaire importante amorcée par son travail de recherche laborieux de son essai.

Couverture de l'essai de Pascal Boyer
Couverture de l’essai de Pascal Boyer

« Et l’homme créa les dieux », paru en 2001, observe à la loupe les thèmes récurrents en lien avec la religion par le prisme historique, culturel, social et scientifique. Son écrit tente de résoudre des questionnements universels comme la formation des croyances religieuses grâce aux avancées de la science, de la psychologie et de l’anthropologie.

Pascal Boyer
Pascal Boyer

IMMERSION DANS LE DESSIN EN NOIR ET BLANC REALISTE DE JOSEPH BÉHÉ

Béhé, auteur de ce roman graphique est un passionné de cinéma et de bande dessinée. Il est coutumier des sujets difficiles qu’il aime mettre en image comme le signale, dans sa préface, Pascal Boyer. Et il est reconnu pour son implication importante dans le monde de la bande dessinée ainsi que pour ses illustrations au trait réaliste et soigné. Après avoir travaillé dans la littérature jeunesse, il publie son premier album de la série « Péché Mortel » en 1989.

Béhé
Béhé

Quelques années plus tard, il est à l’origine de la création du site AtelierBD.com, une école en ligne de BD. Citons d’autres de ses BD comme les séries « Double je » et « Le légataire » ainsi que des titres comme « Le chant du Pluvier », « Erminio le Milanais » et « Pour l’amour de l’art ». Ce roman graphique explicatif s’attaque à un sujet complexe et universel en le vulgarisant. Pour appuyer cette démarche didactique, les dessins en noir et blanc sont très expressifs et naturalistes.

Dans « Et l’homme créa les dieux », chaque exemple de l’anthropologue est illustré et débattu avec ses invités.

Des dessins, qui sont, d’après Pascal Boyer, parfaitement en adéquation aux idées de son essai initial. On peut aussi signaler l’omniprésence de Pascal Boyer représenté en tant que personnage principal dans cette BD. Une mise en abime judicieuse qui permet de mieux appréhender sa démarche initiale de maïeuticien et d’anthropologue en pleine discussion auprès d’un public d’amis à qui il expose la diversité des religions et des questionnements parfois paradoxaux qui l’entoure.

Planche de "Et l'homme créa les dieux"
Planche de « Et l’homme créa les dieux »

TENTATIVE DE RÉSOLUTION DES MYSTÈRES DE LA RELIGION PAR LA VULGARISATION

A travers cette approche imagée, le lecteur se projette alors plus facilement et se reconnaît aisément à travers la diversité des opinions avancées par les invités. Il intègre cette discussion au rythme d’un débat réglé ou chacun apporte sa pierre à l’édifice et interagit avec le maïeuticien. Une invitation intellectuelle et spirituelle autour d’un repas dans un jardin, à différents moments de notre quotidien. Cette évolution du raisonnement des personnages est palpable, au gré des pages, en miroir de l’enrichissement progressif du lecteur.

Extrait de "Et l'homme créa les dieux"
Extrait de « Et l’homme créa les dieux »

Le lecteur voyage dans le temps et dans l’espace. Dans « Et l’homme créa les dieux », on se rend d’abord au Mali, dans les années 60, ou les rites sorciers et les croyances magiques sont dépeints. Puis quelques pages plus tard, on se retrouve en Sibérie, au début du 20ème siècle, où la maladie est combattue avec des Tam Tam et des références aux esprits. Une diversité d’époques et de pratiques religieuses qui montre que ces croyances sont multiples et partagées sur toute la surface du globe.

Un mystère reste entier : Pourquoi l’homme croit et de quelle manière déploie-t-il bon nombre de ses actions autour de ces croyances ?

Et si l’esprit humain et les pensées étaient tout autant mystérieuses que la religion, l’origine du monde et nous permettaient d’observer la religion sous un autre angle ? Pourquoi certains croient et d’autres non ? Croire ou ne pas croire telle est la question.

En neufs chapitres, nous suivons les hypothèses de Pascal Boyer qui montrent que les explications spontanées massivement relayées sur la religion, par tous les hommes y compris les croyants, sont parfois fragiles. C’est pourquoi, il met en avant des explications scientifiques sans omettre de relater les contextes culturels, politiques et historiques qui ont impacté sur l’évolution de ces croyances.

Autre planche extraite de "Et l'homme créa les dieux"
Autre planche extraite de « Et l’homme créa les dieux »

« Et l’homme créa les dieux » : un positionnement scientifique

Dans ce récit imagé, les observations de psychologues comme Justin Barret sont relatées ainsi que des théories éclairantes comme la psychokinésie, la théologie expérimentale ainsi que la psychologie évolutionniste. Pascal Boyer met sur le même plan croyances surnaturelles et mythiques ainsi que religions monothéistes au grand dam de certains détracteurs qu’on retrouve au sein du roman graphique.

L’homme est un animal social et la religion lui permet de se réunir avec ses semblables au sein d’une communauté religieuse. Elle remplit des fonctions bien définies en termes de morale, de rituels du quotidien et de salut après la mort. Et elle repose sur des mécanismes inconscients et des programmes voir des biais mentaux invisibles pour la plupart. Il en vient alors à l’observation suivante : les hommes ont créé des religions à leur image en écho à ce qu’ils vivent au quotidien. Ces religions se muent en doctrines et déclenchent parfois le fanatisme. Un moyen de soulever également les liens étroits entre religion et politique.

« Et l’homme créa les dieux » en bref

Ainsi, « Et l’homme créa les dieux » aborde la thématique de la religion sous tous les angles même ceux qu’on aurait tendance à ne pas relever. La religion est pour Pascal Boyer, un moyen de consolider des concepts culturels, psychologiques et politiques solidement ancrés dans notre inconscient. En proposant une vision anthropomorphe et collective de croyances métaphysiques et surnaturelles en fonction de chaque culture, la religion estompe jusqu’à un certain point le flou dans lequel l’homme est parfois contraint d’évoluer.

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Par Audrey Poussines,

Journaliste web et print passionnée par les faits de société, la culture, l'environnement, le sport et bien d'autres rubriques. En matière de sport, je suis très intéressée par les sports extrêmes. Je suis aussi une fan d'art urbain et d'art moderne, de gastronomie du terroir et exotique, captivée par tout moyen d'expression : danse, littérature, musique...

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