Nous sommes au XXIème siècle et tous les rois français sont passés à la postérité. Tous ? Non ! Un archipel du Pacifique Sud est toujours gouverné par trois monarques. Bienvenue à Wallis et Futuna, terre des royaumes coutumiers.

Vous pensiez l’époque de la monarchie définitivement révolue en France ? C’est que vous n’avez jamais entendu parler d’Uvéa, Sigave et Alo, les trois royaumes des îles Wallis et Futuna.

Ce territoire ultramarin est la partie française la plus éloignée de la métropole. C’est simple, on peut difficilement faire plus loin : pas moins de 16 000 km séparent ces îles de Paris.

Rattaché à la République Française via un référendum en 1961, ce territoire d’outre-mer n’a jamais été colonisé. Ses gouvernants ont sollicité le protectorat français à la fin du XIXème siècle. Depuis, un système bien à part est en vigueur, dans lequel les institutions gouvernementales existent en parallèle de la coutume. Cette dernière recouvre un folklore, des évènements, une culture, mais aussi des lois et une gouvernance.

Comment cet archipel diamétralement opposé à la métropole est-il devenu français ?

Trois royaumes, une coutume

La carte de Wallis et Futuna
La carte de Wallis et Futuna

La République garantit aux populations du territoire des îles Wallis et Futuna le libre exercice de leur religion, ainsi que le respect de leurs croyances et de leurs coutumes en tant qu’elles ne sont pas contraires aux principes généraux du droit 

C’est par ces mots que la loi française garantit à Wallis et Futuna le respect de sa coutume.

Trois royaumes divisent l’archipel (Uvéa, Sigave et Alo). Chacun d’eux sont dirigés par des rois issus des familles nobles de l’île. Ces rois s’entourent d’une équipe de ministres qui gèrent les relations avec les chefs de villages.

Sont-ils l’équivalent des maires de métropole ? Pas vraiment. S’il représente une autorité suprême, le roi est aussi garant d’une culture millénaire dont le ciment est la coutume.

La coutume est pour beaucoup une somme de témoignages vivants du passé polynésien. Danses, chants, fêtes, colliers de fleurs… C’est aussi un fonctionnement complexe des relations entre les individus et une façon de prendre part à la vie sociale. On parle de « faire la coutume ». Cela concerne autant le présent que l’on apporte lors d’une invitation à dîner, que la résolution de problèmes juridiques.  

Les premiers habitants de Wallis et Futuna

Vestige d’une poterie du peuple Lapita - Crédit
Vestige d’une poterie du peuple Lapita – Crédit

Cet archipel isolé au milieu de l’océan passe sous le drapeau français en 1961. Mais il faut remonter 3400 ans en arrière pour retrouver trace d’une présence humaine. C’est le peuple Lapita qui mettra le premier le pied sur ce sol polynésien.

Ce peuple préhistorique de nomades parcourt le vaste océan en pirogue. Ces marins hors-pairs naviguaient entre des îles parfois éloignées de plus de 3500 km ! On retrouvera des traces de leur passage dans toutes les îles du Pacifique Sud, principalement sous la forme de poteries. Les archéologues considèrent qu’ils sont à l’origine de l’art océanien.

Tout au long des siècles, le peuple Lapita façonne la culture polynésienne. Wallis ou Futuna pourraient peut-être même être Hawaïki, l’île mythique vers laquelle tous les esprits retournent.

L’arrivée des occidentaux

Samuel Wallis se demande comment il appellera sa prochaine découverte - Crédit
Samuel Wallis se demande comment il appellera sa prochaine découverte Crédit

1767 : l’Amiral Samuel Wallis (son nom vous dit quelque chose ?) est persuadé qu’il existe un autre continent au sud de l’Amérique du Sud. Partant à sa recherche, il arpente les océans. Il tombe d’abord sur Tahiti, qu’il nomme l’île du Roi George : il est anglais et patriote. Plus loin, il accostera à Uvea, qu’il nommera l’île Wallis. En toute modestie.

Les Hollandais ont déjà découvert depuis plus de 150 ans les iles voisines de Futuna et Alofi. Les marchands ont choisi le nom d’Iles Horn, du nom de leur port de départ.

Dès le XVème siècle, les rois coutumiers des trois royaumes sont à la tête de l’archipel, selon le même système de chefferie qu’aujourd’hui. Issus de migrations des îles Tonga et Samoa, ils recevront bientôt la visite de ceux qui changeront à jamais leur culture : des missionnaires Maristes.

L’évangélisation et la demande de protectorat français

Deux pères maristes et des séminaristes à Lano (Wallis), environ 1890 - Crédit
Deux pères maristes et des séminaristes à Lano (Wallis), environ 1890 – Crédit

En 1837, au terme d’un voyage de 11 mois, débarque la première mission Mariste. Il s’agit d’un ordre du catholicisme dont la devise est « aimer Marie et la faire aimer ». Ce sont les premiers occidentaux qui s’installeront durablement à Wallis et Futuna. A sa tête celui-qui sera plus tard le premier martyr d’Océanie : Pierre Chanel.

9 ans après leur arrivée, la totalité de l’archipel est catholique. Dans l’intervalle, Pierre Chanel aura été assassiné par des partisans du roi Niuliki, qui règne alors sur toute l’île de Futuna. Aujourd’hui encore, l’influence catholique est manifeste : les écoles publiques n’existent pas sur l’archipel.

C’est sous l’influence des pères Maristes que la reine de Wallis fait une demande de protectorat à la France en 1886. Elle craint une invasion Tongienne. Le roi de Futuna s’associe à cette requête. L’histoire de Wallis et Futuna sera donc commune. La France accepte, heureuse de bénéficier d’une position stratégique dans cette partie du monde.

Un référendum écrasant

Les wallisiens défendent les couleurs de leur village lors de la fête annuelle de la danse Crédit
Les wallisiens défendent les couleurs de leur village lors de la fête annuelle de la danse Crédit

73 ans après la demande de protectorat, c’est un référendum qui est proposé à la population. L’enjeu : faire de Wallis et Futuna un territoire pleinement français. Un territoire d’Outre-Mer. C’est une victoire sans appel pour le « oui » qui l’emporte à 94% des suffrages exprimés.

La coutume et le système de chefferie ancestral cohabite donc avec les lois de la République. Ainsi, la gestion des affaires territoriales est assurée par les autorités coutumières.

Le rôle des rois est éminent. Leur influence importante. Le royaume est la circonscription territoriale équivalente à la commune.

Les représentants des assemblées françaises se rendent régulièrement à Wallis et Futuna pour témoigner de son fonctionnement. Ainsi, en 2014, un groupe de Sénateurs rapportait : les institutions locales résultent d’une alliance surprenante mais réussie entre la coutume et la République. Nous avons mesuré la ferveur patriotique des Wallisiens.

Wallis et Futuna est donc un territoire isolé certes, mais profondément connecté à sa culture ancestrale, qu’il parvient à allier avec brio avec la culture française. A leur manière, ce peuple Polynésien contribue au rayonnement de la France qui infuse jusqu’en Océanie.

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Par  Marjorie Lacherez,

Marjorie aime le fromage, le yoga, la raclette, danser, courir, dormir, courir, écrire, jouer, courir. Bretonne, elle a un faible pour les cultures britanniques. Elle vit à Nantes entourée de trois garçons -dont un bébé - dans une maison à fort potentiel (travaux en cours). Un jour ils partiront en vacances en Grèce.

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