Dans l’imaginaire collectif, la bibliothèque fait communément référence à de longs rayonnages couverts de livres, à une ambiance feutrée, à un lieu de silence et d’étude. Au-delà de cette image d’Epinal, les bibliothèques sont en réalité un lieu de pouvoir. Que ce pouvoir soit exclusif ou partagé, il revêt toujours le même enjeu de possession du savoir et de prestige.

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Salle de lecture du site Richelieu de la Bibliothèque nationale de France, Paris, France
Par Arthur Weidmann

Les bibliothèques ont longtemps été l’apanage des rois, un symbole de leur puissance dès l’Antiquité, à Pella ou Antioche.

Les intellectuels eux aussi pouvaient posséder des bibliothèques privées, comme Aristote : ces lieux et ces collections étaient toujours la marque d’une élite.

C’est à Alexandrie que fut fondée la première bibliothèque publique du monde. Créée vers 300 avant J.-C. au cœur du palais royal, dans une cité n’ayant que quelques décennies d’existence, elle contribuait donc au rayonnement de cette ville nouvelle. Réunissant plus de 530 000 rouleaux, ce lieu mythique a ainsi attiré les grands intellectuels de son temps – tel Euclide –, qui étaient logés et entretenus par le roi. Elle fit des émules, comme à Pergame, où l’on trouvera jusqu’à 200 000 volumes dans les années 30 avant J.-C. Les Romains reprirent le modèle hellénistique : on ne compte pas moins de 28 bibliothèques à Rome en 377. Bibliothèques certes publiques mais toujours symboles du prestige du souverain, soucieux de placer le savoir au cœur des emblèmes de son pouvoir.

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Salle de lecture de la bibliothèque du Congrès, Washington, Etats-Unis
Par Dale Youngkin

Au Moyen-Age, les bibliothèques sont d’abord réservées aux religieux.

Les monastères abritent textes liturgiques et manuscrits anciens et sont chargés de la copie de ces documents. Celle du monastère du Mont-Cassin, en Italie, comptant plus de 2 000 volumes, était la plus importante d’Occident. Dès le XIIe siècle, les universités nouvellement créées prennent le relais en Europe, comme c’est déjà le cas dans le monde arabe.

L’université d’Al Quaraouiyine, au Maroc, créée en 859, abrite ainsi la plus ancienne bibliothèque au monde encore en activité, qui réunit aujourd’hui 20 000 manuscrits. Dans le même temps, de nombreux rois créent leurs bibliothèques, qui sont souvent à l’origine des bibliothèques nationales actuelles. C’est le cas de la Bibliothèque nationale de France (BNF), dont la genèse remonte à Charles V, qui crée en 1368 la bibliothèque du roi, comprenant 917 manuscrits et installée au Louvre.

C’est à partir du XIVe siècle et la naissance de l’humanisme que des bibliothèques publiques voient le jour en Europe.

La première ouvre à Florence dans le couvent de San Marco, puis en 1571, celle des Médicis est aussi mise à disposition du public. Ce mouvement s’accélère à partir du XVIIIe et particulièrement au XXe siècle. En 1800 est fondée la Bibliothèque du Congrès des Etats-Unis, ouverte au public deux siècles plus tard. Avec ses 162 millions de documents, ses 350 000 m2 et ses 3 500 employés permanents, il s’agit aujourd’hui de la plus grande bibliothèque au monde. Suivante dans le classement, la Bibliothèque nationale de Chine, située à Pékin, est créée en 1909 et renferme 26 millions de livres, écrits en 115 langues.

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Rayonnages de la bibliothèque de Binhai, Tinajin, Chine
Par Muzzleflash

Par Laure Armand d’Hérouville,

Après avoir vécu son enfance à travers le monde et mené à bien des études d’Histoire et de gestion de projets culturels, Laure Armand d’Hérouville exerce depuis 10 ans dans cet univers créatif et exaltant. Elle est désormais consultante indépendante, en particulier dans le domaine des musées et du patrimoine.

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