Si aujourd’hui le soutien-gorge est un habit qui suscite de vives réprobations, notamment à travers le mouvement No Bra, il a pourtant été conçu dans un objectif d’émancipation. Retour sur l’histoire de ce vêtement, à présent, décrié.

Du Corset au soutien-gorge

Le corset
Le corset

Depuis le 15ème siècle, les femmes arboraient comme sous-vêtement un corset, visant à comprimer la taille afin de faire ressortir la poitrine et les hanches. Fabriqué dans un premier temps avec des morceaux de bois, ce matériau a progressivement été remplacé par des pièces de métal.

Véritable symbole de féminité, ce vêtement récolte de nombreuses plaintes en raison des maux qu’il provoque. La compression de la taille à son maximum induit chez les porteuses du corset des malaises, des douleurs aux côtes et au dos, mais également des indigestions. Il gêne sérieusement la respiration de celles qui le portent, tout en leur empêchant d’exécuter des mouvements simples comme marcher, se pencher ou encore s’asseoir.

Convaincue que le corset est un réel objet d’oppression pour les femmes, Herminie Cadolle invente en 1898, le “corselet-gorge”, dans l’ambition de libérer les femmes de ce carcan.

Herminie Cadolle, une inventrice féministe

Création d’Herminie Cadolle – droits maison cadolle

Militante dans l’un des premiers mouvements féministes de France, “l’Union des femmes pour la défense de Paris et les soins aux blessés”, Herminie Cadolle travaille en tant qu’ouvrière dans une usine de fabrication de corsets. En 1887, alors qu’elle est partie s’installer à Buenos Aires, elle imagine un corset séparé en deux avec des bretelles pour retenir la poitrine par les épaules, qu’elle intitule le “Bien-être”. 

À travers son invention, Herminie Cadolle ne souhaite pas seulement libérer le corps des femmes de cet oppressant corset qui les empêche de se mouvoir à leur guise, elle souhaite également les émanciper. Deux ans plus tard, en 1889, elle rentre en France, convaincue que le confort apporté par le vêtement qu’elle vient de créer va séduire les autres femmes.

Elle présente alors sa création lors de l’Exposition universelle de Paris, mais l’ancrage important du corset dans la vie des femmes ne lui permet pas de rencontrer immédiatement un franc succès. Son invention rencontre véritablement son public, dix ans plus tard, dans une société en plein changement, où les femmes s’émancipent.

En 1898, sa création est brevetée. Herminie Cadolle ouvre alors son propre atelier à Paris en 1910 et emploie près de 200 ouvrières; la Maison Cadolle, encore active aujourd’hui, est née. Si le soutien-gorge se répand petit à petit, en raison de robes de plus en plus larges, il séduit véritablement les femmes lorsqu’elles commencent à devenir actives lors de la première guerre mondiale.

Des années 70 au mouvement #NoBra, le soutien-gorge pointé du doigt

Le soutien-gorge, plus si libérateur
Le soutien-gorge, plus si libérateur

En pleine révolution sexuelle, dans les années 70, des militantes féministes brandissent leur soutien-gorge pour dénoncer la sexualisation du corps féminin et pour s’opposer aux représentations de femme-objet. Le soutien-gorge devient alors étendard de revendication.

Plus récemment, c’est la tendance No Bra qui a vu le jour, avec notamment le #NoBrachallenge sur les réseaux sociaux, pour exhorter les femmes à ne plus porter ce vêtement. Face à l’apparition ces dernières années de soutien-gorge hyper “push-up”, assez désagréable à porter, certaines femmes rejettent ce vêtement pour gagner en confort. D’autres abandonnent volontiers cet habit pour s’opposer à l’injonction du port du soutien-gorge en société.

Formant une poitrine haute,ronde et amplifiée, les soutiens-gorge dissimulent la forme naturelle des seins, reproduisant ainsi un aspect fantasmé du corps des femmes. De plus, ils camouflent les tétons afin qu’ils n’apparaissent pas sous les vêtements. Hyper-sexualisée, cette partie du corps est même censurée automatiquement sur plusieurs réseaux sociaux.

C’est donc véritablement en tant qu’objet d’oppression et d’inconfort que le soutien-gorge est de nos jours décrié

Mouvement no bra - getty images
Mouvement no bra – getty images

Le No Bra séduit d’ailleurs de plus en plus de femmes. 7 % d’entre elles affirment ne plus en porter à l’heure actuelle, alors qu’elles n’étaient que 3% à le prétendre avant le premier confinement.

Autrefois vêtement révolutionnaire et libérateur, dans une époque où les femmes rentraient dans la vie active, le soutien-gorge se confronte aujourd’hui à une autre mouvance émancipatrice: celle de disposer librement de son corps, sans subir d’injonctions.

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Par  Caroline Garnier ,

Journaliste et Podcasteuse, j'apprécie manier ma plume pour vous proposer des articles instructifs et dépaysants. Si je possède un intérêt pour de nombreuses thématiques, j'aime particulièrement écrire sur des sujets culturels, societaux et environnementaux. Ce qui m'anime avant tout: le plaisir de vous faire découvrir !

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