Il y a plus de 1 600 ans, Rome est assiégée par les Wisigoths. Ce peuple, alors défini comme « barbare », met à sac le centre névralgique de l’Empire romain. La puissance majeure de l’Occident traverse une période de difficultés économiques comme géopolitiques. Le 27 août, ce dernier sac de Rome s’achève. Il est considéré aujourd’hui comme l’un des marqueurs de la fin de l’Antiquité et le début du premier Moyen Âge.

En 410, Rome est mise à sac pour la dernière fois dans l’histoire de son empire. Un tel épisode n’était pas arrivé depuis le pillage de la ville par le gaulois Brennus en 390. Le siège intervient dans un moment de faiblesse militaire romaine et dans un contexte global difficile. L’Empire fait en effet face à de nombreuses problématiques sociales, politiques et territoriales. La fin du siège marque historiquement la fin de ce déclin et le début de la période médiévale.

Les Wisigoths, vraiment barbares ?

Ce peuple d’origine germanique s’est installé autour de la mer Noire aux premiers siècles de notre ère. Ce n’est que vers 270 qu’ils s’installent dans l’actuelle Roumanie, qui faisait alors partie de l’Empire romain. Un siècle plus tard, le peuple migre à nouveau vers la péninsule Ibérique et l’actuelle Aquitaine. Cette installation fait l’objet d’un traité et leur roi, Alaric, a un statut élevé dans l’administration de l’Empire. Le sac de Rome relève donc plus d’une rébellion que d’une invasion.

Dès le début de leur cohabitation avec les Romains, les Wisigoths ont été désignés comme « barbares ». Ce terme signifie, à l’origine, « qui ne parle pas la langue commune ». Il a aujourd’hui une connotation relativement péjorative liée à leur caractère guerrier. Or, il serait réducteur de résumer les Wisigoths à leurs faits d’armes. On leur connaît en effet un art très raffiné, au style unique et à la technicité éprouvée, notamment dans les domaines de l’orfèvrerie et de l’architecture.

Couronne votive du roi wisigoth Receswinthe, Wikimedia Commons
Couronne votive du roi wisigoth Receswinthe, Wikimedia Commons

Les Wisigoths, avec d’autres peuples dits barbares, gagnent constamment en puissance face à l’Empire romain. On peut ainsi citer en exemple les Ostrogoths et les Huns. Tous se retournent progressivement contre Rome du fait de sa corruption et sa politique de taxation. C’est dans ce contexte qu’a lieu le sac de la ville en 410.

Un contexte difficile pour l’Empire romain

Rome traverse alors une longue période de crise interne tant qu’externe. La population romaine aisée fuit les villes afin de ne pas payer de taxes, ce qui appauvrit le gouvernement. Parallèlement, les habitants des campagnes sont attirés par les loisirs proposés en ville. Les terres agricoles sont de moins en moins exploitées. L’esclavage, système pilier de l’économie et de la société romaine, vacille. De nombreux esclaves fuient ou sont affranchis sous l’influence de la chrétienté.

Église de Santa Maria Melque, Wallpaper Flare
Église de Santa Maria Melque, Wallpaper Flare

D’un point de vue politique, la situation n’est pas plus simple. La tétrarchie (quatre personnes dirigeantes) est instaurée par Dioclétien en 284 pour simplifier les problèmes liés aux successions. Cependant, le système s’essouffle rapidement. Les fils des empereurs se battent successivement pour se partager l’Empire tout en conservant une supériorité sur les autres. Enfin, l’Empire connaît de grands fractionnements territoriaux. Les peuples limitrophes deviennent de plus en plus puissants et font régulièrement des incursions sur le territoire. Les Romains ont du mal à contrôler la situation. Ainsi, vers 300, les Perses parviennent à prendre la Mésopotamie. Au siècle suivant, plusieurs peuples germains différents s’emparent de la Gaule puis de la péninsule italique. L’Empire romain, séparé entre empire d’Orient et empire d’Occident, se disloque progressivement. Seule sa partie orientale est stable.

Le sac de Rome ou comment prendre une ville en trois jours

En 410, la ville de Rome est militairement vulnérable. Les garnisons ont été dépêchées dans d’autres villes de l’Empire afin de contenir les invasions. Menés par Alaric, les Wisigoths l’assiègent donc sans difficulté. Le 24 août, ils y pénètrent par le nord-est. Durant trois jours, la ville est mise à sac. Les Wisigoths pillent et détruisent les grandes demeures et les bâtiments publics, hormis les édifices religieux. Beaucoup d’habitants sont tués, d’autres fuient en Afrique.

Peinture de Jean-Noël Sylvestre représentant le sac de Rome par les Wisigoths en 410, SNL.no
Peinture de Jean-Noël Sylvestre représentant le sac de Rome par les Wisigoths en 410, SNL.no

Le feu ravage cependant une partie de Rome. Les archives impériales sont notamment détruites, tout comme de nombreuses sculptures et bibliothèques. Quelques documents sont préservés : ils sont ensuite transférés au Vatican ou à Constantinople (actuelle Istanbul). Alaric quitte Rome le 27 août. Il emmène avec lui la sœur de l’empereur, Galla Placidia. Elle devient par la suite une des plus célèbres impératrices wisigothes.

La fin du déclin de l’Empire romain ?

Cet événement au large retentissement entraîne un traumatisme durable chez la population de l’Empire. La noblesse romaine réfugiée diffuse le récit terrifiant du siège de la ville sur un large territoire. Saint Jérôme qualifie alors Rome de « tombeau ». Les populations fidèles au polythéisme antique considèrent la progression du christianisme comme la cause de cette chute.

Pièce de monnaie de l’Empire romain d’Orient à l’effigie de Galla Placiia, Worldhistory.org
Pièce de monnaie de l’Empire romain d’Orient à l’effigie de Galla Placiia, Worldhistory.org

De nos jours, l’impact de ce sac sur la fin définitive de l’Empire fait débat. Une partie des scientifiques la considèrent comme la date « référence » de sa chute. En effet, après le siège, les empereurs n’ont quasiment plus de pouvoir ni d’influence. La majorité des historiens estime en revanche qu’il serait incorrect de considérer que Rome a chuté aussi brutalement. Ils perçoivent le siège comme un événement logique au cœur d’une évolution progressive de l’Antiquité vers le premier Moyen Âge.

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Par Sarah Gouin-Béduneau ,

Sarah est historienne de l’art et s’est spécialisée dans la gestion du patrimoine culturel. Elle aime toutes les formes de création visuelle, s’intéresse énormément à la musique et au patrimoine industriel et travaille actuellement dans la conservation et la documentation des biens mobiliers.

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