Source d’inspiration sans fin pour les artistes, la saison de l’été est représentée dans une multitude d’œuvres d’art, de la peinture à la littérature, en passant par la musique et le cinéma…

Le cycle des saisons n’a de cesse d’être représenté dans les arts et l’été n’y échappe pas ! Mais comment les artistes ont-ils réussi à retranscrire dans leur art respectif tous les ingrédients de l’été ? Quelles sont les œuvres d’art qui transpirent l’été ? Celles qui suintent l’odeur du blé fraichement moissonné ? Ou bien encore qui dégoulinent de farniente, de teint halé et de crème glacée ?

Peut-on observer des évolutions dans la représentation de cette saison au fil du temps ? Les œuvres d’art sont-elles des témoins de certaines évolutions sociales comme le week-end ou les congés payés ? Impossible pour moi de vous dresser une liste exhaustive tant les œuvres célébrant l’été foisonnent dans tous les arts. J’ai donc pris le parti de m’appuyer sur certains symboles ou éléments caractéristiques de l’été que l’on retrouve à travers différents arts et époques.

L’été : une ode à la nature

À l’époque de la Renaissance, le peintre Giuseppe Arcimboldo a travaillé sur le thème des quatre saisons. Il représente chacune d’elle par une figure humaine de profil. Dans son œuvre « L’Été » (1563), on découvre donc un personnage formé par différents fruits et légumes. Une pêche représente sa joue, sa dentition est une cosse de pois. Un épi de blé lui sert de sourcil… Quoi de plus logique de former un personnage avec des fruits et légumes de saison ?

La campagne et les champs sont également très représentés dans la peinture. Le thème de la moisson se retrouve notamment dans plusieurs œuvres telles que « La Moisson » de Pieter Bruegel l’ancien (1565). On peut considérer ce tableau comme une véritable étude de l’homme dans la nature. On dresse ici une scène de vie quotidienne traitée de façon objective et réaliste, montrant le dur labeur des paysans. La peinture sert ici de témoignage de la réalité sociale d’une population.

Dans l’œuvre impressionniste « La Moisson » peinte en juin 1888, Vincent Van Gogh désire clairement peindre et représenter la saison de l’été.

En effet, le peintre utilise des couleurs chaudes comme le jaune paille ou le rouge orangé. Il illustre alors les champs de blés provençaux où il séjourne. L’atmosphère de chaleur se dégage nettement et on perçoit cette lumière si puissante voire aveuglante de la Provence. Vincent Van Gogh aurait affirmé qu’à l’inverse du printemps « l’été n’est pas facile à exprimer ». Il considérait à ce titre cette toile comme un de ses chefs-d’œuvre.

En musique classique, difficile de ne pas citer les concertos pour violon de Vivaldi. Les fameuses « quatre saisons ». Composé entre 1723 et 1725, cet hymne célèbre la nature et la climatologie ! Dans « L’Été », Le compositeur baroque italien traduit en musique la nature en créant des ambiances sonores caractéristiques. Le troisième mouvement de l’été figure par exemple l’orage et la tempête éclatant après une chaude journée du mois d’août.

Le soleil : élément indissociable de la saison

Du lever à son coucher, le soleil est la star de l’été que l’on retrouve dans différents arts ! En musique, je pense évidemment au tube « Here come the Sun » de George Harrison. Mais penchons-nous un peu plus sur « Sunny ». On dénombre une centaine de versions de ce classique du grand répertoire américain. Qui n’est d’ailleurs pas une chanson du groupe Boney M ! Écrite par le musicien afro-américain Bobby Hebb, cette chanson sans refrain est une métaphore météorologique dédiée à Harold Hebb. Ce frère ainé de Bobby fût poignardé en 1963. Cet hymne à l’été représente donc une promesse. Celle de jours meilleurs après l’immense chagrin de la perte de son frère.  

Au cinéma, la scène d’ouverture de « La La Land » (2016) constitue une séquence culte de ce film musical à grand succès. Les personnages principaux sont coincés dans un énorme embouteillage sur un autopont de Los Angeles. Des danseurs sortent alors de leurs voitures et réalisent une incroyable chorégraphie sur le titre  « Another Day of Sun ». En regardant cette scène, on ressent d’abord parfaitement l’atmosphère lourde et pénible de se retrouver bloqué dans le trafic alors qu’il fait un soleil de plomb. Puis soudain, la magie opère et débute un ballet surréaliste entre les voitures et sur leurs capots. L’ambiance devient de plus en plus festive et différents danseurs rivalisent dans des « battles ». Et cette phrase lancinante se répète : « encore une journée ensoleillée ». Comme pour inviter le spectateur a lui-même se mettre à danser !

Les vacances d’été : douceur de vivre et farniente ?

Pour illustrer le thème des vacances dans les arts, j’ai envie de parler du photographe Martin Parr ! J’adore comment ce photographe britannique a capturé des scènes de vacances. Démontrant les habitudes de la société et toutes ses contradictions. On se délecte en regardant ces femmes en maillots de bain qui bronzent sur la plage. Ces enfants tâchés par la glace qu’il sont en train de manger… (cf notamment sa série « The Last Resort » ou ces photos sur Yalta en Ukraine). Le photographe s’amuse entre satire et cruauté a révélé la vie de ses congénères. Mais il porte également un regard critique sur la société de consommation et la mondialisation. Sa photo « La plage artificielle de l’Ocean Dome » à Miyazaki (Japon) prise en 1996 m’a particulièrement frappée. Comment en est-on arrivé à créer des plages artificielles pour combler un désir ou « un besoin » de vacances ?

En peinture, de nombreux tableaux retranscrivent un des plaisirs de la saison : le déjeuner en extérieur.

Le Déjeuner sur l'herbe
Déjeuner sur l’herbe, Manet

« Le Déjeuner des canotiers » (1880-1881) de Pierre-Auguste Renoir montre par exemple un groupe de personnes dans un restaurant en train de déjeuner en plein air, au bord de la Seine. » Le Déjeuner sur l’herbe » (1862-1863) d’Édouard Manet représente par exemple un pique-nique dans un jardin avec une femme nue et des personnages habillés de manière contemporaine. La nudité de cette femme représentée fit d’ailleurs scandale à l’époque ! George Seurat livre également une très belle peinture pointilliste de pique-nique dans « Un dimanche après-midi à l’île de la Grande Jatte » (1883–1886). Dans ces œuvres, le plaisir et la détente sont évidents, on ressent la douceur de vivre et de profiter de l’instant présent.

En musique, impossible de ne pas évoquer « Summer time » ! Billie Holiday, Janis Joplin, Ella Fitzgerald, Miles Davis, Louis Armstrong… On ne compte plus les artistes ayant repris ce titre culte ! Ce standard des standards du jazz vient d’un air de l’opéra « Porgy and Bess » de George Gershwin (1935). Le texte de cette berceuse douce-amère se veut optimiste. Il y a cependant un grand écart entre son texte empli de douceur et son contexte. En effet, ce tube raconte la vie des Afro-Américains dans la Caroline du Sud des années 1930. La sonorité de cette chanson est ambiguë car c’est un blues. Elle n’est donc ni triste ni joyeuse mais les deux à la fois ! Malgré ce contexte lourd, je ne peux m’empêcher personnellement d’associer cette chanson à cette sensation de flottement si agréable… Quand on est en vacances l’été sous un soleil qui brille…

L’été au bord de l’eau : plutôt mer ou piscine pour la baignade ?

Les Baigneuses, Courbet
Les Baigneuses, Courbet

L’été étant normalement la saison la plus chaude, on l’associe à l’eau qui permet de se rafraichir. La baignade et plus particulièrement la baigneuse est un thème récurrent chez les peintres comme Gustave Courbet, Pablo Picasso ou encore Auguste Renoir. La femme est généralement représentée nue. Mais dans son tableau « Les Baigneuses » (1853), Courbet choisit de rhabiller son modèle au moyen d’un drapé à l’antique. Cela permet d’idéaliser la baigneuse en la rendant moins érotique. La mode des bains de mer et de la plage inspire et influence notamment Picasso dans de nombreux tableaux. Pour lui, la baigneuse représente la liberté et la création. Les hommes, moins représentés dans cette thématique, se retrouvent tout de même dans les tableaux de Frédéric Bazille, Paul Cézanne ou encore David Hockney.

Si je vous dis « piscine », à quoi pensez-vous ? Au cinéma, je pense forcément à « La Piscine » (1969), film de Jacques Deray avec notamment Alain Delon, Romy Schneider et Jane Birkin ou encore à « Swimming pool » de François Ozon (2003) avec Charlotte Rampling et Ludivine Sagnier. Dans ces deux films, un parfum de liaisons dangereuses flotte autour des corps bronzés se prélassant au bord de la piscine !

En peinture, on peut citer l’œuvre spectaculaire d’Henri Matisse : « La piscine » (1952).

Mesurant 8,5mètres sur 2, cette création d’Henri Matisse est réalisée sur des panneaux de céramique et exposée au musée Matisse. Ce sont des compositions monumentales en papiers gouachés qu’il découpe pour ensuite les coller sur différents supports. Dans cette œuvre, il met en scène des corps des baigneuses. Matisse aurait trouvé l’inspiration pour cette œuvre en regardant des nageuses dans une piscine au Cap d’Antibes à l’hôtel Éden Roc. Ces femmes qui nagent sont peintes de façon imagée et poétique, avec ce bleu si puissant et particulier chez Matisse.

Pour clore notre sujet chloré 😉, on ne peut parler de piscine sans évoquer David Hockney qui voue une véritable obsession sur ce sujet ! Son œuvre « A Bigger Splash » (1967), est la troisième d’une série sur ce thème, après « The Little Splash » et « The Splash ». On dit que le peintre britannique aurait eu une révélation en regardant un magazine de construction de piscines qui deviendront sa marque de fabrique ! Ce tableau montre la Californie rêvée de l’artiste. Au cinéma, le film « A Bigger Splash » (1974) de Jack Hazan, raconte trois années de la vie du « peintre des piscines californiennes », de 1971 à 1973. On le voit notamment peindre son œuvre « Portrait of an Artist (Pool with Two Figures) » (1972) qui représente un homme penché au-dessus d’une piscine tandis qu’un autre s’approche en nageant sous l’eau.

L’été : c’est le temps de l’amour !

L’été est une saison souvent propice à la rencontre amoureuse ! Amour de vacances ou amour pour toujours, de nombreux artistes ont célébré l’amour sous le soleil. En musique, on peut citer par exemple : « Amour d’été » de Johnny Hallyday (1967) qui est une adaptation de « Love Me Tender », « Une belle histoire » chantée par Michel Fugain (1972), « L’été indien » interprétée par Joe Dassin (1975), « C’est l’amour à la plage » de Niagara (1986), « Le Temps est bon » remise au goût du jour grâce à la reprise de Bon Entendeur récemment (2019) … Et bien entendu, « Le Temps de l’amour » chantée par Françoise Hardy (1962) dont nous allons reparler ci-dessous…

Dans son film « Moonrise Kingdom »(2012), Wes Anderson nous plonge dans l’histoire d’un amour adolescent en le sublimant par son esthétique visuelle et colorée, marque de fabrique du réalisateur. Sam, petit scout sans famille et Suzy, jeune fille qui ne trouve pas sa place au sein de sa famille, décident de fuir leurs mondes respectifs. On assiste alors à leur évasion du camp scout et de la maison familiale afin de pouvoir vivre leur histoire en créant leur propre univers ! Quoi de plus approprié pour accompagner cette romance, que la célèbre chanson « Le temps de l’amour » ? Écrite par Lucien Morisse et André Salvet, la musique de cette chanson a été composée par Jacques Dutronc. Le résultat entre l’image et la musique retranscrit parfaitement ce sentiment si intense des amours adolescentes où tout est possible !

Le film « Call me by your name » (2018) de Luca Guadagnino « transpire » l’été à tout point de vue.

Oliver, étudiant américain, rencontre le fils de son professeur Elio en Italie, au cœur de l’été. Tout au long du film, on assiste à l’éveil amoureux de cet adolescent de 17 ans. On ressent la naissance des sentiments entre ces deux personnages dans une atmosphère sensuelle. La bande originale composée par Sufjan Stevens transcende ici le propos du film. Le très célèbre titre « Mystery of Love » accompagne en musique le climax de l’idylle entre Oliver et Elio qui partent explorer la Toscane sur leurs vélos… Une passion estivale qui se vit à l’abri des regards indiscrets comme le résume si bien le dicton : « Vivons heureux, vivons cachés ». Le secret de cette histoire d’amour décuple certainement l’intensité des sentiments magnifiquement racontée dans ce film.

Les nuits d’été : un parfum de magie sous les étoiles !

Nuit étoilée, Van Gogh
Nuit étoilée, Van Gogh

Quoi de plus magique qu’une nuit d’été sous un ciel rempli d’étoiles ? Réussir à peindre un ciel étoilé était une véritable obsession pour Van Gogh comme en témoigne cette confession faite au peintre Emile Bernard : « Mais quand donc ferai-je le Ciel étoilé, ce tableau qui, toujours, me préoccupe » ou bien encore quand il écrivait à sa sœur « souvent il me semble que la nuit est encore plus richement colorée que le jour ». Avec sa « Nuit étoilée » (1889), le peintre hollandais illustre un paysage avec un ciel de nuit parsemé d’étoiles dont l’atmosphère emplie de douceur et de sérénité contraste avec les difficultés qu’il ressent à cette époque. Le peintre démontre ici une grande maîtrise des couleurs et des éléments : des étoiles et une lune éblouissante, un mouvement de spirale, un village qui représente Saint-Rémy-de-Provence…

Le songe d'une nuit d'été
Le songe d’une nuit d’été

« Le Songe d’une nuit d’été » (A Midsummer Night’s Dream) représente un bel exemple d’œuvre ayant transcendé les frontières de l’art. Comédie écrite par William Shakespeare (1594-1595), cette pièce inclassable a inspiré de nombreux artistes. En musique, on peut citer « The Fairy Queen » de Purcell (1692) et bien évidemment l’adaptation de Mendelssohn (1843) dont vous connaissez forcément sa « Marche nuptiale » ! Benjamin Britten a composé, quant à lui, un opéra créé en 1960 ! En danse, le ballet de Balanchine s’est inspiré de cette pièce de théâtre afin de créer un pendant estival à « Casse-Noisette » en utilisant les mêmes ressorts que dans l’œuvre du dramaturge anglais. De nombreuses adaptations au cinéma ont été réalisées également. Dans le film « Le Cercle des poètes disparus » (1989), l’étudiant Neil Perry joue le rôle de Puck dans la pièce, malgré l’opposition de son père.

Au fil des siècles, l’été s’est révélé comme une source inépuisable d’inspiration pour les artistes de tous horizons.

Des scènes ensoleillées et lumineuses aux paysages luxuriants, en passant par l’état d’esprit d’insouciance estivale, les œuvres d’art ont capturé l’esprit et les émotions associés à cette saison envoûtante.

Cependant, l’évolution de la représentation de l’été dans l’art reflète également les changements du monde qui nous entoure. On peut évoquer une évolution de la représentation de l’été du « dur labeur » avec la moisson dans les champs au « pur bonheur » avec la jouissance des vacances mais aussi la mondialisation et ses conséquences !

 Alors que la crise climatique s’intensifie et que les épisodes de canicule deviennent plus fréquents, notre relation à l’été est en train de changer. Il serait donc intéressant d’observer comment les artistes contemporains abordent l’été avec une nouvelle perspective, mettant en lumière les défis auxquels nous sommes confrontés. En conclusion, l’évolution de la représentation de l’été dans l’art reflète à la fois la fascination intemporelle pour cette saison et les préoccupations contemporaines liées à la crise climatique. La prise de conscience écologique ou la réflexion sur notre relation à la nature, l’art continue de nous inviter à explorer et à célébrer l’été tout en nous encourageant à agir pour préserver notre environnement et notre avenir. Une occasion peut-être d’écrire un nouvel article sur une page en cours d’écriture de l’histoire de l’été à travers les arts sous le prisme de la crise climatique ?

Pour découvrir encore plus d’articles inspirants, téléchargez l’application Cultur’easy sur Applestore ou Playstore.

Article concocté par Anne-Elise Grosbois ,



"Observer, capturer et partager la Culture", telle est ma devise ! Curieuse et connectée, j’aime m’évader en arpentant les lieux culturels et en voyageant. Freelance spécialisée en stratégie de communication digitale, j'accompagne des structures culturelles et plus particulièrement des artistes du spectacle vivant et de la musique.

Commenter cet article


The reCAPTCHA verification period has expired. Please reload the page.