De tout temps, les hommes les plus haut placés dans la hiérarchie n’ont pas hésité à utiliser la mode comme outil de distinction sociale. Aujourd’hui, pourtant, les codes sont brouillés…

La façon que nous avons de nous présenter au monde est un message. Message que l’on envoie au subconscient des personnes qui nous entourent. En nous vêtissant, nous nous apprêtons à jouer un rôle choisi ou imposé sur la scène historique et sociale. Comme l’explique Daniel Roche, historien français : « l’histoire du vêtir témoigne en profondeur sur les civilisations. Elle en révèle les codes ». C’est donc un facteur de distinction sociale.

On s’habille pour montrer qui l’on est, ce qui facilite l’identification des individus qui partagent notre groupe social. Une étude menée par des chercheurs de l’université de Princeton démontre que :

il nous suffit d’une fraction de seconde pour juger une personne, en fonction de notre perception de ses vêtements.

Avant le 20ème siècle : des codes très visibles

L’étalage de richesse via la mode est devenu une coutume en Europe à la fin du XIIIe siècle. La tenue vestimentaire est alors devenue un outil puissant pour structurer les relations sociales ainsi que pour faire respecter les différences de classes. La distinction sociale est un précepte.

Des lois somptuaires étaient utilisées comme un moyen de contrôler et de maintenir la hiérarchie et l’ordre social grâce aux vêtements. La représentation visuelle des hommes était standardisée et réglementée dans les moindres détails. Les types de vêtements, leur longueur et largeur, l’utilisation de matériaux particuliers, les couleurs et les ornements étaient tous confinés à des catégories de classe spécifiques. Seuls les nobles avaient le droit de porter de la soie, par exemple. Il était alors très facile de deviner en un coup d’œil la classe sociale à laquelle un homme appartenait.

Après de nombreuses contestations de la part des groupes de la classe inférieure de la société, les lois ont finalement été abolies dans la seconde moitié du XVIIIe siècle. Est-ce la fin de la distinction sociale pour autant ?

Le 21ème siècle : des codes brouillés

Aujourd’hui, évaluer la classe sociale d’un homme rien qu’à sa tenue n’est plus une tâche facile. Les catégories sont devenues floues. Les frontières ne sont plus bien définies.

Contrairement à nos ancêtres très normés, nous valorisons aujourd’hui la mobilité inter et intra-classe. Nous ne sommes plus condamnés à rester rangés dans la même classe que celle de notre famille. Nous avons la possibilité d’être acceptés par le groupe que nous avons choisi… et d’en adopter les codes.

Mode  Hipster
Mode Hipster

Grâce à l’avènement d’Internet, nous pouvons désormais identifier ces codes, et l’industrialisation de la mode nous permet de nous les approprier, quels que soient nos moyens. L’affichage de la position sociale d’une personne à travers sa tenue vestimentaire est donc devenue plus subtile et éclectique. La clé de l’évaluation se trouve désormais dans les détails. Un statut social plus élevé se reconnaît dans un vêtement parfaitement coupé, un tissu “noble” et coûteux et dans le choix de la marque. Les accessoires (lunettes, montres et chaussures) restent également des symboles qui sont propres aux différentes catégories sociales.

Quels sont les vêtements et accessoires masculins qui, aujourd’hui, révèlent encore une forme de distinction sociale ?

Depuis la fin des années 2000, on voit cohabiter deux types de pièces associées aux plus hautes strates de la société.

L’uniforme de “l’homme d’affaires”

Chemise, costume ajusté, montre dispendieuse et chaussures Richelieu brillantes… Bref, le dressing de James Bond.

Les vêtements et accessoires “Streetwear” de luxe

Dans un contexte où le poids du costume sur le vestiaire masculin s’allège, où la proportion de travailleurs indépendants augmente chaque année, les hommes ont plus de liberté pour se vêtir… Plus besoin de porter l’uniforme de l’homme d’affaires pour montrer son sentiment d’appartenance à sa catégorie sociale “CSP+”. Et cela tombe bien, car depuis quelques années, le confortable “streetwear” fait une ascension fulgurante dans la hiérarchie de la planète mode.

A première vue, ces baskets semblent plutôt simples, non ?

Et pourtant… elles se vendent à plus de 3.000€. C’est-à-dire l’équivalent d’environ trois costumes Armani.

Selon Frederic Godart, sociologue français : “les codes vestimentaires ont beaucoup changé… on se demande, même, s’ils ne se sont pas inversés, « le pauvre » s’habillant comme « le riche », « le riche » comme « le pauvre »…” La direction des changements de tendances n’est plus unilatérale : la mode traverse des lieux géographiques, et découle à la fois des centres traditionnels et de la « périphérie ». Grâce aux médias mondialisés et à la culture populaire, les membres des classes inférieures et des groupes sous-culturels et marginaux peuvent désormais influencer la mode autant que ceux des classes supérieures.

La mode masculine est entrée, avec le 21ème siècle, dans une nouvelle ère

Elle s’est affranchie du poids de la distinction sociale qui a pesé sur elle des siècles durant et est désormais plurielle. Dans un monde dans lequel les hommes ne se définissent plus par leur catégorie sociale, les vêtements et les accessoires servent davantage de marqueurs d’identité que de symboles d’un statut particulier.

Aujourd’hui, la classe sociale est davantage déterminée par les choix de mode de vie, les pratiques de consommation, le temps consacré aux loisirs, les modes d’interaction sociale, la profession, les tendances politiques, les valeurs personnelles, le niveau d’éducation et/ou les normes sanitaires et nutritionnelles…

Pourrait-on aller jusqu’à dire que l’habit ne fait plus le moine ? Je vous laisse trancher…

Par Chloe Van Dooren,

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SOURCES :

Neurosciencenews

TheConversation.com

Journal OpenEdition.org

L’Express

Elle

Fashion History

Rédactrice et coach de 31 ans, Chloé est animée par la curiosité. Comment les êtres humains fonctionnent-ils ? Pourquoi développent-ils certains comportements ? Comment sont-ils arrivés là où ils sont aujourd’hui ? Ces interrogations guident sa vie et ses écrits… Toujours saupoudrés d’humour et de fantaisie.

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