Le street art, ce mouvement subversif, s’est aujourd’hui bien ancré dans nos sociétés. On en voit partout, aux quatre coins du globe. L’art urbain occupe la scène artistique depuis des dizaines d’années, mais qu’est-ce qui fait qu’une œuvre, ou un artiste se démarque d’une ou, d’un autre ? Il y a plusieurs réponses à cela, mais la grandeur de l’œuvre et l’immensité qu’elle impose n’y sont pas indifférentes. Et c’est ce qui nous intéresse ici : l’immense. Plongée dans un phénomène artistique qui nous en met toujours plein la vue.

Le roi de l’emballage et de l’œuvre éphémère

Pont Neuf, photo par IMMA ABETE
Pont Neuf, photo par IMMA ABETE

Dit comme ça, ce n’est pas très vendeur, je vous l’accorde. Mais vous vous doutez déjà sûrement de qui je parle… Christo bien sûr ! L’iconique artiste – ou plutôt le couple d’artistes, Christo et sa femme, Jeanne-Claude – a fait sa renommée en emballant temporairement de célèbres monuments. Parmi eux ? Le Pont Neuf à Paris en 1985 ou encore le Reichtag à Berlin en 1995.

Il est aussi connu pour ses “Surrounded Islands”. 11 îles de la baie de Biscayne à Miami, s’étendant sur plus de 11 kilomètres, sont encerclées d’une ceinture de polypropylène rose fuchsia. Au total, l’œuvre nécessite 603 870 m2 de matériaux, découpés selon 79 patrons pour suivre les contours des 11 îles. En deux endroits, les ceintures de deux îles proches fusionnent pour ne former qu’une seule bande rose.

surrounded islands -  christo - photo par Jennifer Mei
surrounded islands – christo – photo par Jennifer Mei

Les travaux commencent en 1981, l’œuvre est terminée le 7 mai 1983. Cette création a également été l’occasion de nettoyer les îles de la baie qui servaient de décharge. Cette appropriation de l’espace et de la nature, s’appelle le Land art, on utilise la nature comme cadre de l’œuvre et/ou comme matériau à sa construction.

Une autre œuvre très connue de Christo, est celle des jetées flottantes en Italie

Christo, Floating Pears, Lago d'Iseo, 2016 - photo par Cosa2244
Christo, Floating Pears, Lago d’Iseo, 2016 – photo par Cosa2244

Il a créé en 2016, sur le lac italien d’Iseo, une installation éphémère longue de 3 kilomètres et composée d’un assemblage de 200 000 cubes jaunes en polyéthylène de haute densité. Avec ces passerelles, les visiteurs pouvaient atteindre à pied, l’île de Monte Isola et l’îlot San Paolo sur le lac. Ainsi, ils avaient l’impression de marcher sur l’eau “ou peut-être sur le dos d’une baleine” disait Christo. Cette installation fût la première de Christo en solo, depuis le décès de sa femme en 2009, avec qui il travaillait étroitement depuis 1970, dans la conception de ses immenses projets.

Christo est décédé en mai 2020, il avait pour projet d’emballer l’Arc de Triomphe… C’est à l’automne 2021 que le projet verra tout de même le jour, comme un hommage posthume à l’œuvre et la vie de ces artistes extraordinaires.

Grandes installations et grandes polémiques

Le street art s’exprime sous différentes formes, après le Land art de Christo, on peut aussi retrouver des sculptures, comme celles de Paul McCarthy. La plus équivoque en France, est une sculpture gonflable géante de couleur verte, appelée “Tree”, installée en plein Paris, place Vendôme en 2014. L’artiste américain, crée d’immenses sculptures gonflables dont la forme ambiguë est très souvent polysémique. Cette œuvre a choqué, car elle faisait écho à un jouet sexuel pour adultes. Vandalisée, la création de Paul McCarthy a été retirée.

McCarthy n’est pas le seul à se retrouver dans la polémique. Banksy l’a déjà été par exemple. Mais c’est aussi Charles Ray qui s’est retrouvé dans la tourmente à la suite d’une sculpture à taille humaine, à Venise, face à la basilique Saint-Marc. Son œuvre, Le garçon à la grenouille n’a pas plu. Son emplacement privilégié et le patrimoine historique de la ville ont joué dans la balance. La sculpture a ainsi été retirée. Si cette œuvre n’est pas considérée comme du street art par certains, elle est pourtant l’essence même de cet art : installée en zone urbaine, disponible et accessible à tous.

Quand l’immensité du street art envahit les musées

MOCA Art in the Streets: Swoon "ice queen" - photo par helkimchee
MOCA Art in the Streets: Swoon « ice queen » – photo par helkimchee

Vous allez me dire, on s’éloigne de l’art urbain dans ce paragraphe, mais non, car ici, il s’agit d’une des plus grandes artistes de l’art urbain. Je parle ici de Swoon. Poétesse et humaniste dans ses œuvres, Swoon a créé d’immenses installations pour trois musées : le MOCA à Los Angeles, l’ICA à Boston et le NOMA à la Nouvelle-Orléans. La plus remarquable est peut-être La Reine de glace (The Ice Queen) au MOCA dans le cadre d’une exposition sur l’art dans la rue.

Elle a ainsi créé une sculpture multimédia immersive, de presque 5 mètres de haut. Sa structure en forme de tente invite les spectateurs à explorer les détails complexes de sa composition. Éclairée de l’intérieur, l’installation lumineuse projette des ombres spectaculaires grâce aux délicates découpes de papier sur le tissu qui l’entoure, jouant ainsi avec l’espace positif et l’espace négatif.

Une autre de ses immenses œuvres, est sa fresque à l’Institut de l’Art Contemporain à Boston (ICA).

À l’occasion de ses 75 ans, l’Institut a demandé à l’artiste new-yorkaise, de créer la cinquième installation du Sandra and Gerald Fineberg Art Wall. S’étendant de l’atrium de l’ascenseur jusqu’au hall d’entrée. S’élevant à 13 mètres jusqu’au plafond. La nouvelle installation de Swoon a été la plus grande à occuper le Fineberg Art Wall. L’œuvre, intitulée Anthropocene Extinction, est composée de flux de papier finement découpé. Ils relient les principaux éléments de l’installation, notamment une sculpture en bambou suspendue de 400 livres.

Les murs, immenses terrains de jeu pour les street artistes

Parce que parler des moments où le street art s’est fait immense sans parler des fresques murales, ça n’est pas envisageable, les murs sont le cadre idéal pour des œuvres de rue aux proportions incroyables.

Le mur est l’un des premiers cadres d’expression des street artistes. Ils sont là, un moyen d’occuper l’espace, de divertissement, d’embellissement de la ville et surtout, ils sont accessibles à tous. Car en pleine zone urbaine (comme ils le sont très largement) tout le monde peut les admirer.

Dans cette catégorie, les artistes sont nombreux à s’y être illustrés. Au commencement, nous avions Diego Rivera, célèbre conjoint de la grande Frida Kahlo. Et puis se sont exprimés des dizaines d’autres street artistes, Kobra, JR, Jeff Aérosol, Shepard Fairey, Daze, Lady Pink, Basquiat, Keith Haring, … et j’en passe.

Lorsque ces artistes occupent l’espace public et créent leurs œuvres d’art, elles ne passent pas inaperçues, tant par leur beauté, leur atypisme, leur message ou, justement, leur immensité.

Avec le street art, nous n’avons pas fini d’être surpris.

Est-ce que la folie des grandeurs intervient dans le processus de création d’une œuvre ? Seul l’artiste le sait. Ce qui est sûr, c’est que leurs œuvres aux proportions démesurées attirent toujours et font toujours parler d’elles, que ce soit par leur démesure, leur fabrication, leur originalité, ou leur sujet.

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Article concocté par Clara Lefevre-Manond,

Née à Lille, passée par les Deux-Sèvres, Clara est revenue dans la capitale des Flandres pour ses études. Danseuse classique, elle a aussi fait du tennis. Sportive, elle ne laisse pas un challenge lui saper le moral. Souriante et généreuse, voilà comment la qualifier. Mais attention, sous ses yeux bleus, se cache un sacré caractère : qui s’y frotte s’y pique !

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