D’abord contrainte technique puis choix artistique, le noir et blanc a traversé les époques. Il propose une version du monde inédite et authentique.

Aujourd’hui, la photographie couleur est majoritaire. Pourtant, le noir et blanc séduit encore les amateurs du huitième art. Une pratique exigeante, aux codes complexes qui offre une liberté inégalée.

UN PEU D’HISTOIRE

L'héliographie de Nicéphore Niépce
L’héliographie de Nicéphore Niépce

Capturer le réel pour en conserver une trace indélébile. C’est le défi que le français Nicéphore Niépce a relevé. Au début des années 1820, il développe l’héliographie, le tout premier procédé photographique. En 1838, Louis Jacques Daguerre, l’associé de Niépce, invente le daguerréotype. D’autres techniques photographiques sont mises au point, toujours en noir et blanc. C’est alors une vraie révolution dans le domaine artistique.

Les recherches se tournent alors vers des procédés qui rendent compte de la vision humaine en couleurs. En 1903, l’invention de l’autochrome par les frères Lumière marque le début de la photographie couleur. C’est à la fin du XXe siècle que la photographie couleur commence à s’imposer. Le noir et blanc devient alors un choix artistique.

LA COULEUR FAIT DÉBAT

Memphis par Williams Eggleston, 1969
Memphis par Williams Eggleston, 1969

Les pionniers de la photographie comme Brassaï, Robert Doisneau ou Henri Cartier Bresson ont marqué les époques. Leurs clichés emblématiques ont posé les bases techniques et esthétiques de la photographie moderne, avec une contrainte de taille : le noir et blanc. L’arrivée de la couleur à la fin du XXe siècle bouleverse les codes. Certains y voient une possibilité de magnifier le quotidien et le banal.

Les photographes américains William Eggleston et Stephen Shore marquent le début de la reconnaissance de la photographie couleur. Pourtant, le noir et blanc reste davantage considéré. Certains photographes s’érigent en partisans du monochrome. Ils partagent l’idée que la couleur représente une surcharge pour l’œil : « Moins il y a de choses, plus on en voit. Il arrive que la couleur fasse oublier le sujet principal », déclare le photographe américain Harold Baquet.

TOUT UN APPRENTISSAGE

Observer une scène en couleurs et la visualiser en noir et blanc, ça s’apprend. Cela demande de voir le monde autrement, de développer un “regard noir et blanc”. Le photographe doit se détacher des couleurs et apprendre à lire la lumière. Il doit connaître le langage du noir et blanc.

Penser en monochrome lors de la prise de vue facilite le travail en post-traitement. La photographie numérique et les logiciels de retouche offrent de nouvelles possibilités : ajuster la luminosité, les tonalités et jouer avec les contrastes et les zones d’ombres. Des réglages qui donnent aux clichés un caractère unique.

RENFORCER LE GRAPHISME POUR RETENIR L’ATTENTION

Portraits par le studio Harcourt (Faîtes vos propres portraits avec la cabine photo de luxe du Studio Harcourt)

Le noir et blanc offre une intemporalité et une esthétique unique. Le travail de la lumière, de la luminance et des contrastes permet de créer des ombres et des textures qui fascinent. D’ailleurs, le grain des photos à l’argentique permet un rendu des textures très apprécié. Ces réglages mettent en exergue les formes, les lignes d’une photographie. Ils structurent les sujets, marquent les contours donc accentuent le graphisme des images.

Aussi, l’absence de couleur permet de guider les regards. Le photographe peut attirer l’attention sur ce qu’il définit d’essentiel dans son cliché. C’est ce qui rend le monochrome intéressant. Les techniques du High key et Low key permettent cela. Très utilisée pour les portraits, la première consiste à privilégier les tons clairs. À l’inverse, le Low key privilégie les zones sombres riches en nuances.

UNE PART D’IRRÉEL

The Tetons and the Snake River par Ansel Adams, 1942
The Tetons and the Snake River par Ansel Adams, 1942

Opter pour le noir et blanc, c’est faire le choix de ne proposer qu’une partie du réel. C’est privilégier l’interprétation à l’analyse. En effet, les tonalités et les couleurs sont culturellement associées à des émotions. Les tons froids sont associés à la distance, le bleu à la tristesse ou la mélancolie. Aussi, le noir et blanc renforce la puissance d’une atmosphère : “le monde en noir et blanc recèle quelque chose de mystérieux qui ne peut être décrit et qui est formidablement séduisant”, déclare Shoji Ueda, photographe japonais du XXe siècle.

Le photographe peut davantage orienter les émotions des spectateurs. Mieux l’artiste travaille la luminosité, les contrastes et les tonalités, plus l’ambiance est forte. Il peut par exemple jouer sur le temps de pose. Plus il est long, plus il accentue l’ambiance irréelle d’un cliché.

LES GENRES QUI S’Y PRÊTENT

Au départ pour des raisons techniques, aujourd’hui comme par tradition ou par choix artistique, le noir et blanc reste de prédilection pour certains genres photographiques. C’est le cas de la “photo de rue”, aujourd’hui associée au photojournalisme, à la photographie documentaire et sociale. Avec ses photos nocturnes de Paris publiées en 1932 dans le livre Paris de nuit, Bassaï marque le genre.

Autre genre traité en noir et blanc : le portrait. Richard Avedon ou Norman Seeff, portraitistes des années 60 et 70 en sont des références. Également les paysages. Ansel Adams en est le maître. Comme pour suggérer une certaine pudeur, les nus ont souvent été photographiés en noir et blanc. En témoignent les clichés de Saul Leiter, artiste des années 50.

Faire le choix du noir et blanc, c’est faire le choix de voir et proposer de voir le monde autrement

Cela demande de maîtriser les codes de la photographie et de savoir en jouer. L’absence de couleur permet au photographe de mettre en exergue des éléments plutôt que d’autres et laisser une part du réel de côté. Aujourd’hui, le noir et blanc n’est plus une contrainte, mais un choix, qui permet une esthétique unique et puissante. Partagez en commentaire un cliché noir et blanc que vous aimez !

Retrouvez également toutes les techniques de photographie pour un noir et blanc réussit !

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Par  Marie Magnin,

Moi c'est Marie Magnin, j'ai 23 ans ! Je suis passionnée de photographie, sensible à l'écologie et j'adore découvrir de nouvelles cultures. Jeune diplômée en communication, j'ai toujours aimé écrire et jouer avec les mots. J'ai à cœur de développer ma créativité et ma curiosité dans toutes mes aventures, et de ne jamais cesser d'apprendre !

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