Salut, moi c’est Caroline, on se retrouve au musée pour une expérience hypnotique ?

Juliette Verga : ce que je vous propose maintenant que nous sommes entrés dans la salle, c’est tout simplement de placer les pieds l’un à côté de l’autre. De la largeur de vos hanches et les mains comme ça, l’une en face de l’autre. Vous allez choisir entre vos mains à peu près au milieu un point que vous allez observer le plus fixement possible. Comme si à ce moment précis, à ce moment-là, rien d’autre ne comptait. Comme si de l’autre côté de ce point, ce point incolore, invisible que vous avez choisi, se trouvait cette relation renouvelée, amplifiée, densifiée, à ce que vous allez voir à partir de maintenant.

« On se retrouve au musée? » est un podcast du musée de Cluny, musée national du Moyen Âge.
Production et Réalisation : Cultur’easy Podcast et Sens de la Visite
Signature sonore : Théo Boulenger

Jérémie : allô ?

Caroline : bah Jérémie, qu’est-ce que tu fais ? Je croyais que t’étais à Cluny, moi, pas à ton cours de yoga.

Jérémie : moi, je suis en plein cœur du musée de Cluny et je suis en train de suivre à distance une visite hypnotique.

Caroline : une visite hypnotique à Cluny ? Mais en quoi ça consiste ? C’est pas commun, ça.

Jérémie : c’est en train de se dérouler juste à côté de moi, justement, et je vais aller à la rencontre de Juliette Verga LaLiberté. Elle est hypnologue. C’est elle qui les a créées, ces visites hypnotiques. Et je vais aller lui poser quelques questions.

Caroline : alors ça, ça m’intrigue. Il faut que je vienne voir ça de plus près.

Jérémie : comment vous est venue l’idée d’organiser et de créer, parce que c’est une vraie création, une visite hypnotique pour un musée ? Et en l’occurrence Cluny ?

Juliette Verga : alors, je pense que les visites hypnotiques, c’est quelque chose qui m’est apparu avant même de m’inscrire en formation.

Je pense que quand j’ai, moi, consulté, pratiqué, éprouvé l’hypnose, comme j’avais l’habitude des visites de musée, moi-même, je me suis dit, et j’ai joué de ça, autant au jardin qu’au musée, sur plonger à l’intérieur de l’œuvre.

Pouvoir ralentir, se débarrasser un peu du dialogue intérieur, de la vie extérieure pour être vraiment dans cette relation directe avec ce que l’on regarde.

Pour le musée de Cluny, j’ai été contactée par Anne Sophie Grassin, qui est spécialiste en médiation sensible et qui m’a demandé de créer spécifiquement pour des salles du musée.

Caroline : bon ! vous vous demandez sûrement ce que sont les médiations sensibles. Il s’agit de visites originales pour découvrir le musée et ses œuvres d’une autre façon qu’avec ses yeux. Dans cette ambition, le musée de Cluny propose donc des visites hypnotiques, mais aussi des visites chantées, hantées, théâtralisées ou encore dansées, animées par des professionnels.

C’est un moment suspendu au milieu de ce lieu chargé d’histoire et c’est surtout une façon très sympa de découvrir ou de redécouvrir Cluny. Dans le cas de l’hypnose, je trouve que c’est surtout une combinaison intrigante et originale. Je suis bien curieuse de voir à quoi ça ressemble.

Jérémie : et bah Caroline, justement, je suis là pour ça. Juliette, concrètement, comment ça se passe une visite hypnotique ?

Juliette Verga : j’accueille les gens dans l’entrée, ce qui me permet de leur présenter rapidement. Ensuite on va avoir à peu près, suivant les groupes, un quart d’heure où il y aura cinq minutes pour dire que l’hypnose, c’est à la fois les outils, l’état, etc.

Et puis on va préparer cet état d’hypnose avec ce que nous appelons une induction, soit par fixation, on va souvent travailler comme ça, soit par une spirale sensorielle. On va utiliser les sens externes et internes au corps pour venir stimuler la synesthésie des esprits.

Ensuite, les personnes, soit en déambulant dans la salle, soit en se retournant comme ça, comme on fait un 360 degrés, vont chacune choisir un détail, une couleur, une œuvre, avec quoi elles veulent se relier ce jour-là.

Qu’est-ce qu’elles veulent observer ? Ça, ça va prendre un temps. Pendant ce temps-là, le travail va se faire et on va passer de l’un à l’autre dans des jeux qui consistent, c’est vraiment l’imagination a cette haute fonction cognitive des jeux qui consiste à imaginer être regardé par l’œuvre que l’on regarde.

Par exemple, imaginer quel peut être le goût de ce que l’on regarde. Il y a quelque chose que j’ai beaucoup apprécié, que je n’avais pas prévu.

C’est la toute première visite au Frigidarium, mais venue l’idée que : une chose que l’on peut pas faire, c’est toucher. Et donc inviter les personnes à imaginer qu’elles posaient réellement leurs mains et de prendre le temps à l’intérieur de la paume et pas seulement à l’intérieur de la tête, de ressentir le lisse, le rugueux, la température.

Qu’est-ce que c’est de toucher ça ?

C’était une surprise pour moi aussi et ça a fait de très belles choses aussi en termes de ressenti des personnes présentes. Je les encourage souvent puisqu’elles ont cette possibilité de continuer à déambuler dans le musée et de jouer de cette partition. On l’ancre par la voix, on l’ancre en reprenant les étapes de la séance qui vient de se dérouler.

Caroline : en fait, Cluny tranquille, au milieu des œuvres du musée, ça permet non seulement de voir les œuvres de façon complètement nouvelle et de s’y intéresser, de s’y connecter avec un regard neuf, mais en même temps, ces visites nous remuent, nous, profondément, en tant que visiteurs. La visite devient comme un bon prétexte pour prendre du temps pour soi et se déconnecter de nos vies à 100 à l’heure. Et rien qu’en écoutant Juliette Verga LaLiberté parler, je me sens déjà beaucoup, beaucoup plus détendue. Mais faire de l’hypnose dans le musée Cluny, ça doit aussi donner lieu à de belles anecdotes, non ?

Jérémie : Oui, tu as raison, Caroline. Juliette, est ce qu’il y a des visites qui vous ont marquées ?

Juliette Verga : celle qui m’a le plus moins touchée, c’est une personne qui savait par avance quelle œuvre elle allait choisir. C’était une œuvre qui avait déjà de l’importance pour elle dans sa vie personnelle, intérieure, et qui, alors qu’on sortait de la visite, partageait avec quelqu’un d’autre, je passais par hasard, le fait que maintenant, c’est entre cette œuvre et elle, c’était une histoire d’une vie.

Et pourtant, la relation était déjà forte, mais j’ai été un peu obligée de l’interrompre et de l’interroger parce que c’était touchant pour moi. Elle l’avait relié à un moment fort de son existence réelle. Il y a eu des larmes pendant une visite également, parce que dans ce temps d’introspection, un temps qu’on s’offre assez peu.

Et puis, le fait de passer comme ça par ces différents sens externes, mais aussi internes, le sens de son équilibre, le sens de ce qui se passe à l’intérieur. Peut ouvrir comme ça des espaces d’émotion qui, chez nous, se manifestent souvent par des larmes qui peuvent être des larmes de soulagement, d’apaisement, qui ne sont pas toujours synonymes de tristesse. Je ne pensais pas qu’elles apparaîtraient dans un lieu comme le musée.

Des corps qui se redressent aussi.

On voit ça. Des personnes qui sont un peu mal à l’aise, qui croisent les bras malgré les consignes. Et puis finalement et bien, les coudes se soulèvent ou la tête se penche. Donc le corps est très… On travaille en médiation sensible avec un corps qui est pensant, qui est vraiment, qui porte l’essence, qui porte l’esprit, qui est central. Et ça, c’est des beaux moments. Mais c’est vrai que ce que je retiens par rapport à l’intention du départ, c’est vraiment ce « j’avais choisi cette œuvre, mais maintenant, c’est à la vie à la mort. » Ça s’est installé dans mon histoire.

Jérémie : c’est donc une belle manière de vivre le musée.

Caroline : en tout cas, cette visite hypnotique qui s’inscrit dans les médiations sensibles du musée de Cluny est vraiment une façon originale de découvrir les œuvres. Ça rend le musée tellement plus vivant. Et si vous voulez vous aussi tenter l’expérience, rendez-vous sur le site du musée, cherchez Cluny tranquille dans l’agenda pour réserver une de ses visites.

Jérémie : chuuut ! j’essaye de me détendre.

Caroline : bon, je vous laisse. La visite hypnotique a repris. Allez, à très vite au musée de Cluny. Eh Jérémie, ça dit qu’on réserve la visite chantée. C’est un super artiste qui vient la semaine prochaine. Tu sais, je t’en avais beaucoup parlé la dernière fois quand on avait été boire avec la Clara… C’était trop beau.

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