Dans cette fresque historique sublime et désenchantée, Victor Hugo dénonce les criantes injustices sociales de son époque, privant le peuple de toute dignité humaine. Les Misérables qui sont les personnages principaux sont des étendards, et leurs actions des leçons sur la nature humaine.

Victor Hugo est ce qu’on appelle un « grand homme », une figure majeure du 19e siècle. L’un de ses faits d’armes principaux ? L’écriture d’un roman-fleuve populaire en dix volumes : Les Misérables. À la limite du roman-feuilleton, fait exprès pour qu’il soit accessible au plus grand nombre, Les Misérables est un roman écrit pour le peuple mais c’est aussi un roman du peuple. Il constitue en effet une réflexion profonde à propos de son oppression.

Partout où l’homme ignore et désespère, partout où la femme se vend pour du pain, partout où l’enfant souffre faute d’un livre qui l’enseigne et d’un foyer qui le réchauffe, le livre Les Misérables frappe à la porte et dit : Ouvrez-moi, je viens pour vous.

Victor Hugo à son éditeur italien, 18 octobre 1862

Quel est le message des Misérables ?

Les Misérables est l’une des œuvres les plus connues et les plus adaptées au monde. C’est un symbole fort, qui a souvent inspiré le cinéma, mais pas seulement. On en trouve de multiples adaptations au théâtre, en comédies musicales, en dessins animés, et même en bande-dessinées.

Les Misérables, affiche publicitaire de Jules Chéret 
Les Misérables, affiche publicitaire de Jules Chéret 

Un « misérable » c’est une personne qui vit dans une grande pauvreté. C’est bien le lot des gens du peuple dans le Paris de l’époque, et Hugo s’en fait le témoin lucide. Mais « misérable » peut aussi être dit d’une personne qu’on juge méprisable. L’écrivain dénonce ainsi en creux, dès le titre, le jugement hautain et élitiste des membres de la haute société.

La révolte de Victor Hugo transparait à la lecture du roman. Sa rédaction a d’ailleurs été un long accouchement lié à la transformation de ses idées politiques. Déjà commencé en 1845, l’auteur finalise ce monument au cours de son exil à Guernesey, son désaccord avec le nouveau gouvernement de Louis Napoléon Bonaparte sonnant le glas de sa pensée conservatrice.

C’est ainsi que Les Misérables devient l’un des manifestes littéraires de la pensée sociale du 19e siècle. Dans le même esprit que Germinal d’Emile Zola ou la grande fresque de « La Comédie humaine » de Balzac, l’œuvre d’Hugo fait le portrait des victimes de l’ordre social de l’époque. Ce procédé est repris au 20e siècle par des auteurs engagés, tels que Wassili Grossman avec Vie et destin.

« Le pendu », dessin à l’encre de chine, par Victor Hugo
« Le pendu », dessin à l’encre de chine, par Victor Hugo

Le contexte historique et culturel en filigrane

Au sein de la littérature française, Victor Hugo occupe une place à part, à la fois écrivain, dramaturge, dessinateur et bien sûr chef de file du mouvement romantique. Les Misérables est empreint de ce genre nouveau, puisqu’il dépeint des personnages à la fois sublimes comme le petit Gavroche et grotesques comme les affreux Thénardier. Le romantisme se lit aussi dans leur soif de liberté et de sentiment, que cela soit pour Jean Valjean, qui passe sa vie à fuir le bagne, ou pour Cosette qui après avoir été une enfant esclave rêve de suivre son amour pour le jeune Marius.

Ce roman constitue aussi l’image réaliste d’un monde désenchanté, passé par la Terreur et par l’âpreté de la déroute Napoléonienne. Hugo y mêle les destins individuels de personnages issus du peuple aux événements de l’Histoire. L’intrigue commence justement en 1815, au moment de la défaite de Napoléon Ier à Waterloo. Elle se termine par une évocation de la répression des émeutes républicaines de 1832 par la monarchie de Juillet. Cet épisode n’est d’ailleurs pas sans rappeler, pour l’auteur et ses contemporains, la plus récente révolution de 1848.

Tournage de la scène des barricades, ©Alev Adil
Tournage de la scène des barricades, ©Alev Adil

Le romancier se sert ainsi du contexte historique troublé pour placer ses personnages dans une nouvelle sorte d’épopée, une épopée moderne dont les héros sont des misérables, élevés par leurs actions au rang de figures mythiques.

Les Misérables, en bref

Nous sommes donc en 1815 et Jean Valjean réussi enfin à sortir du bagne. Après une belle démonstration de charité chrétienne de la part d’un évêque comme on n’en fait plus, qu’il avait volé, Valjean a une révélation. Il sera un honnête homme ! Il se met ainsi au service du bien et sa vie durant secourt les autres et fait preuve de clémence.

Cosette balayant, dessin, par Emile Bayard, 1862
Cosette balayant, dessin, par Emile Bayard, 1862

Grand tournant dans l’histoire, notre homme fait la promesse à Fantine, prostituée mourante, de secourir et recueillir sa fille, Cosette. L’enfant est le souffre-douleur des abominables Thénardier depuis que sa mère ne paie plus la pension. Installés à Paris, Jean Valjean et Cosette sont poursuivis par le féroce inspecteur Javert, qui cherche tout le long du roman à renvoyer notre héros au bagne. Partis se cacher dans un couvent pour lui échapper, ils y passent quelques années paisibles. Cosette a grandi, elle rencontre Marius, un jeune idéaliste et ils tombent amoureux.

Gavroche ramassant des balles pour la barricade, huile sur toile, par Adolphe Léon Willette
Gavroche ramassant des balles pour la barricade, huile sur toile, par Adolphe Léon Willette

De nombreuses embûches se dressent sur leur chemin, aussi bien la prudence de Valjean que la jalousie de la famille Thénardier. Désespéré, Marius s’engage dans les émeutes bouleversant Paris. Il y rencontre le petit Gavroche, fils abandonné des Thénardier. Nous sommes en 1832, les révoltés élèvent des barricades pour se protéger de l’armée. Mais c’est un massacre. Gavroche meurt en chantant, devenant martyr laïc de la république, et Marius en réchappe de peu grâce à Valjean. Après d’autres péripéties, les amants peuvent s’unir et la bonté de Valjean est enfin reconnue.

En définitive

Bien plus qu’une condamnation de l’injustice sociale, Les Misérables constitue une « légende du siècle ». Sur le modèle de la peinture d’Histoire, Hugo nous dépeint le 19e siècle dans tout ce qu’il pouvait avoir de cruel mais aussi de grandiose. L’auteur excelle à créer des mythes, et cela lui permet relier le monde entier avec ses œuvres, grâce à un imaginaire et des repères communs.

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Par  Ophélie Gasiglia ,

Culturomaniaque toujours en vadrouille, je suis une habituée du syndrôme de Stendhal. Véritable couteau-suisse des métiers du livre et de la culture, je suis à la fois libraire aux goûts éclectiques, jeune rédactrice et aspirante traductrice. Mes marottes : les mythes et légendes, les cultures hispaniques, les danses du monde, et le chocolat !

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