L’odyssée du manga débute bien avant son âge d’or dans les années 50, au Japon. Dès le 13ème siècle, ce terme est utilisé pour désigner les dessins dynamiques de certains ouvrages comme le Chouju-giga et le Shiji No Yukikai . Depuis le manga a fait de grands bonds. Il n’a cessé d’attirer de nouveaux lecteurs, s’exportant en dehors des frontières du Japon. Une véritable déferlante.

Les années d’après-guerre marquent l’âge d’or du manga au Japon. Il est alors surtout un outil de propagande en plus d’être un moyen d’expression artistique. Les mangas sont publiés massivement dans des journaux spécialisés dont le fameux Jiji Shimpō. Celui-ci bénéficie alors de l’influence américaine des comic-strips, des cartoons et de Walt Disney.

 Jiji Shimpō / 1889
Jiji Shimpō / 1889

Le format papier est reconnaissable entre mille. Lecture de droite à gauche, dessins en noir et blanc, des personnages très expressifs ou caractéristiques. Mais ce sont les animés retransmis à la télévision qui vont faire basculer le manga en objet culturel populaire. Dès lors, le manga s’exporte rapidement en dehors des frontières.

Trois types de mangas

  • Shojo : Destiné à un public féminin jeune, ce manga dépeint souvent l’amour de manière romantique.
  • Shonen : Destiné à un public masculin jeune, ce manga relate des aventures et veut transmettre des valeurs fortes comme l’amitié ou le courage .
  • Seinen : Destiné à un public plus mature. Le scénario est plus profond que dans les shonen. 

Une percée tardive en France

En France, il faut attendre les années 80 pour que le manga connaisse un regain d’intérêt. Et ce malgré des débuts timides dix ans auparavant. Le genre fut marginalisé par les institutions françaises. Notamment pour son caractère informel en comparaison à d’autres supports littéraires jugés plus nobles. Dès la fin des années 70, La revue Le Cri qui tue va contribuer à la reconnaissance du manga dans l’hexagone. Elle publie de célèbres mangas comme Golgo 13. 

Couverture de Golgo 13
Couverture de Golgo 13

Dans les années 80, les animés envahissent les ondes de la télévision occidentale. Engendrant alors une vague d’intérêt croissante pour le manga. C’est le cas de la série Astro, le petit robot, adaptation du format papier Astroboy d’Osamu Tezuka diffusée dès 1986 sur TF1.

Astroboy
Astroboy

On pouvait aussi retrouver sur la même chaîne à la fin des années 80 : Les Chevaliers du Zodiaque de Masami Kurumada.

Sans oublier l’incontournable Dragon Ball Z, d’Akira Toriyama. Diffusée dès 1989, la saga à succès est retransmise au moment du Club Dorothée en France de 1990 à 1996. Elle est précurseure de ces mangas adaptés en séries d’animations battant des records de longévité. Comme One Piece décliné en 976 épisodes ou encore Naruto avec 700 épisodes télévisés à son actif. Comme ces successeurs, Dragon Ball Z a connu de nombreux spin-off. Le dernier en date est Dragon Ball Super diffusé de 2015 à 2018.

À la fin des années 90, le manga gagne un peu plus en notoriété. 

Sakura du groupe de dessinatrices CLAMP, Great Teacher Onizuka de Tooru Fujisawa sont des best-sellers. Pokémon est chaleureusement accueilli dans l’hexagone par petits et grands. Il est aussi le 8ème manga le plus vendu au monde. Les 52 volumes, dont le premier paraît dès 1994, sont vendus à plus de 150 millions d’exemplaires.  Détective Conan marquera aussi le paysage du manga mondial, avec ses 96 volumes vendus à près de 230 millions d’exemplaires. Dans les années 2000, la mode du manga se pérennise :  Fruit Basket ou encore Bleach et Hunter X Hunter vont battre des records d’audience.

Un engouement croissant

Le manga est si populaire qu’il est mis en avant dans plusieurs événements dont le Magic (Monaco Anime Game International Conferences) et la Japan Expo crée en 1999. Mais qu’est ce qui fait que le manga entraîne une telle ferveur à l’échelle du globe ?

De nos jours,  il n’est pas rare de croiser des jeunes et moins jeunes s’empresser au rayon manga. Maëlis, Shaina et Yaël, âgées de 12 à 16 ans, ne cachent pas leur amour pour ce genre. Nées bien après les premiers pas du manga, elles ont rapidement privilégié ce support de lecture. Elles apprécient par-dessus tout l’imaginaire asiatique qui dépayse et les personnages  » très intéressants et profonds « . 

L’offre est pléthorique : en plus des mangas japonais, elles soulignent qu’il existe des mangas papier chinois, autrement appelés les Manhua comme Heaven’s Official’s blessing.

En Corée, on parlera plutôt de Manhwa. Et en France, on trouve plus tardivement des mangas dessinés par des français. On les dénomme les Manfra. La Voie de Van Gogh, assez inattendu, en fait partie. Parmi leurs mangas préférés ? Saiki Kasuo, Charlotte, One Piece et Death Note.

Couverture de Charlotte
Couverture de Charlotte

Ces mangas ont sans doute fait naître des vocations

C’est le cas de Jehan, 22 ans, étudiant depuis maintenant 3 ans à LISAA, une école d’animation parisienne, heureux de voir que le manga est davantage considéré :  » Il faut savoir que la France est le deuxième consommateur de manga dans le monde. J’admire l’effet boule de neige qui s’est produit alors que dans les années 90, c’était encore tabou en France. De voir que maintenant c’est totalement l’inverse ça me fait plaisir « . Bercé par les animés dont ceux de Dragon Ball Z ou encore de GTO,  SNK (L’attaque des Titans) et Naruto retransmis pendant de nombreuses années sur les ondes de la TV française, il lit des mangas et visionne des animés depuis ses 12 ans.

Les pages dédiées au manga se multiplient sur les réseaux sociaux

En atteste la page Mangafanclub, suivie par plus de 42 000 personnes, pour les passionnés de manga papier et d’animés. Un de ses membres atteste que sa communauté est soudée, ne juge pas et s’entraide :  » On favorise le soutien d’une consommation légale du contenus en matière de manga et d’animes via les différentes plateformes existantes « .

Il lit depuis 19 ans des mangas, son genre de prédilection :  » C’est un format qui prône des valeurs comme le dépassement de soi, qui arrive à nous projeter dans un univers « . Lui aussi reste marqué par Dragon Ball Z. Côté narratif,  le manga peut être plus complexe qu’il n’y paraît : « 20th century boys m’a marqué par sa maîtrise des sauts dans le temps au niveau de la narration ». Il apprécie aussi les mangakas coréens :  » En Corée les plus connus à mon sens ce sont Keuk-Jin Jeon, Jin-Hwan Park (auteur de The Breaker), Chuhong (auteur de Solo Leveling) pour ne citer qu’eux « .

Son mangaka préféré reste cependant un japonais au nom Takehiko Inoue, auteur de plusieurs mangas à succès dont Slam Dunk, un manga sportif qui dépeint les tribulations d’une équipe de basket-ball. Les mangas animés font aussi écho aux films poétiques d’Hayao Miyazaki : Le château dans le ciel, Le château ambulant ou encore Le voyage de Chihiro et bien d’autres sont des chefs d’œuvres. Dans son célèbre Studio Ghibli, Hayao Miyazaki adapte aussi ces films animés en mangas papiers.

L'univers de Miyazaki et du Studio Ghibli
L’univers de Miyazaki et du Studio Ghibli

La mort de Kentaro Miura ébranle les fans de mangas

Fin mai 2021, la mort du dessinateur du manga Bersek a fait grand bruit. Parti trop tôt, à l’âge de 54 ans, il n’a malheureusement pas pu achever sa saga, laissant plusieurs fans désœuvrés. Pierre revient pour nous sur ce qui est pour lui l’un des meilleurs seinen qu’il soit : « Berserk, raconte l’histoire de Guts, un jeune mercenaire qui fait la rencontre de Griffith et Casca chefs de la Troupe du Faucon, une bande de mercenaires.

Dessin issu de Berserk
Dessin issu de Berserk

Entre Guts et Griffith naîtra une amitié particulièrement complexe qui oscille entre relation d’intérêt, respect mutuel et affection profonde. Le scénario se déroule dans un univers d’heroic-fantasy, d’inspiration médiévale avec des éléments de la Renaissance ». Ce qu’il apprécie le plus est son réalisme, son style visuel détaillé et sa profondeur : « Le manga se montre sans concession dans sa façon de représenter les choses : la religion, la pédophilie, l’infanticide, le viol, l’abus de manière générale. En filigrane apparaît une réflexion sur l’homme, partagée entre sa monstruosité et son humanité. L’histoire met très bien en lumière toutes sortes de sentiments tels que la rivalité, l’envie, la jalousie, l’ambition et même l’amour ».

En bref

Né au Japon, le format manga s’exporte sous l’influence des Walt Disney et des comic-strips. Depuis les années 70-80, il était pourtant mal parti dans l’hexagone mais il a su gagner le cœur des jeunes comme des moins jeunes. Aujourd’hui, il constitue le segment le plus dynamique du secteur de la Bande Dessinée avec la croissance la plus avantageuse du monde de l’édition. Les valeurs, les particularités et la profondeur des personnages font du manga un véritable succès.

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Article concocté par Audrey Poussines 

Journaliste web et print passionnée par les faits de société, la culture, l'environnement, le sport et bien d'autres rubriques. En matière de sport, je suis très intéressée par les sports extrêmes. Je suis aussi une fan d'art urbain et d'art moderne, de gastronomie du terroir et exotique, captivée par tout moyen d'expression : danse, littérature, musique...

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