Le dalaï-lama est une figure spirituelle et politique que nous connaissons tous. Mais qui est-il vraiment ?

Tenzin Gyatso est plus populaire sous le nom de « dalaï-lama » que sous son véritable nom. Sa fonction, aussi spirituelle que temporelle, disparaitra peut-être avec lui, d’où la légende qui s’est créé autour de ce personnage énigmatique. Il est garant d’une théocratie bouddhiste. Un gouvernement dont le souverain est considéré comme un représentant divin. Pour les croyances locales, celui-ci est une réincarnation perpétuelle du premier dalaï-lama Gedun Drub qui a vécu entre 1391 et 1474. Tenzin Gyatso est considéré comme la 14e réincarnation. Il est ainsi installé au palais du Potala, à Lhassa, le 2 février 1940, âgé d’à peine 5 ans. A la découverte d’un homme au destin hors-norme …

Lhamo Dhondub, originaire de Taktser

Né le 6 juillet 1935 dans le village de Taktser, Lhamo Dhondub est le 4e fils d’une famille de 16 enfants. Dans son autobiographie, il décrit Taktser comme « une petite agglomération misérable » où vivaient une vingtaine de familles. À l’âge de 2 ans, Lhamo est reconnu comme la réincarnation du dernier dalaï-lama, Thubten Gyatso, décédé en 1933. Encore enfant, il quitte le monastère de Kumbum et est officiellement proclamé 14e dalaï-lama le 23 août 1939. Il reçoit par la même occasion un nouveau nom, dont le raccourci est Tenzin Gyatso. Son éducation n’est pas spécialement celle d’un futur dirigeant d’État. Elle ressemble plutôt à celle de n’importe quel moine désireux d’obtenir un doctorat d’études bouddhistes. Tenzin Gyatso étudie donc les 10 branches des études bouddhistes. Les plus importantes sont la logique, la culture et l’art tibétain, le sanscrit, la médecine et la philosophie bouddhique.

Le 14e dalaï-lama et ses assistants au palais du Potala dans les années 1940 (crédit : Wikicommons)
Le 14e dalaï-lama et ses assistants au palais du Potala dans les années 1940 (crédit : Wikicommons)

Un adolescent face au Parti communiste chinois

Tenzin Gyatso est intronisé chef spirituel et temporel du Tibet le 17 novembre 1950. A 15 ans, il devient ainsi le chef de 6 millions de Tibétains qui pressentent une guerre imminente avec la Chine. Avec une armée de seulement 8 500 hommes, le dalaï-lama tente par tous les moyens d’éviter la violence. Il souhaite négocier avec les communistes chinois. Il aurait pu fuir en Inde mais Tenzin Gyatso reste à Lhassa. C’est alors qu’il envoie à Pékin une délégation tibétaine en 1951 qui signe l’Accord en 17 points. Il reconnaît la souveraineté de la Chine sur le Tibet sans que celle-ci renie la religion et le gouvernement tibétain. Il se rend lui-même à Pékin où il passe plus d’un an. En rentrant à Lhassa, il découvre que ses frères ont négocié avec la CIA car les populations tibétaines se soulèvent.

La révolte des Tibétains est marquée par la journée du 10 mars 1959. Un général chinois invite Tenzin Gyatso à venir assister à une pièce de théâtre, sans ses gardes du corps. Les Tibétains imaginent que les Chinois souhaitent enlever le dalaï-lama. La révolte commence, durement réprimée par l’armée chinoise.

Tenzin Gyatso, 14e dalaï-lama, en visite à Pékin en 1954, auprès de Mao Zedong (crédit : Wikicommons)
Tenzin Gyatso, 14e dalaï-lama, en visite à Pékin en 1954, auprès de Mao Zedong (crédit : Wikicommons)

Une mission temporelle en exil

Déguisé en soldat, Tenzin Gyatso fuit Lhassa et le Tibet dans la nuit du 17 mars 1959 avec sa famille. Il rejoint l’Inde où il est accueilli avec enthousiasme par le peuple indien. Le gouvernement se méfie de sa stature politique et religieuse. Sa présence inquiète notamment des dignitaires indiens quant aux relations de leur pays avec la Chine. Le Premier ministre Nehru octroie au dalaï-lama une résidence à Dharamsala, dans l’Himalaya, au Nord de l’Inde. Le lieu n’est pas choisi par hasard : ancienne station britannique, isolée tant géographiquement qu’en terme d’accès par le train. Nehru espère ainsi limiter l’accès des Indiens et de la classe politique au chef tibétain.

Tenzin Gyatso est encore aujourd’hui en exil dans sa résidence de Dharamsala, où il y a installé le gouvernement tibétain en exil.

Le dalaï-lama, Nehru et Zhou Enlai à New Delhi en 1956 (crédit : Homai Vyarawalla – Wikicommons)
Le dalaï-lama, Nehru et Zhou Enlai à New Delhi en 1956 (crédit : Homai Vyarawalla – Wikicommons)

Un chef de guerre non-violente

Tenzin Gyatso a toujours prôné la non-violence, malgré l’occupation des terres tibétaines. Après la mort de Mao, le gouvernement de Deng Xiaoping souhaite renouer des liens avec les Tibétains. En mars 1980, l’inspecteur chinois Hu Yaobang fait 6 propositions pour redonner une autonomie réelle au Tibet. La démarche est inscrite dans une logique de développement économique et social. Cependant, certains groupes du Parti Communiste chinois réinstallent à la fin des années 1980 une politique rigide envers le Tibet. Le 14e dalaï-lama soutient toujours les Tibétains qui souhaitent l’indépendance à la seule condition que la résistance ne soit pas violente. La résistance pacifique passe notamment par la médiatisation des effets de la révolution culturelle mise en place par Mao. Il ordonne la destruction, par tous les moyens, de la civilisation tibétaine. 

En 1988, lors d’un discours au Parlement européen, Tenzin Gyatso propose une « voie du milieu » face à l’impasse de l’indépendance tibétaine. Il demande alors une autonomie, dans le cadre de la constitution chinoise. Icône d’un chef politique sans État, d’un chef spirituel prônant le pacifisme et le respect des Droits de l’Homme. Il reçoit le 10 décembre 1989 le Prix Nobel de la Paix.

Le dalaï-lama à Oslo pour recevoir le Prix Nobel de la Paix en 1989 (crédit : Harry Johansen / Wikicommons)
Le dalaï-lama à Oslo pour recevoir le Prix Nobel de la Paix en 1989 (crédit : Harry Johansen / Wikicommons)

Dernier dalaï-lama ?

Tenzin Gyatso, quatorzième et dernier dalaï-lama : c’est ce qu’il a déclaré le 7 septembre 2014 dans un entretien. Il renonce le 10 mars 2011 à son rôle politique, sans délaisser son rôle de chef spirituel bouddhiste. Toutes les questions demeurent sans réponse quant au futur du Tibet, de son peuple et de son gouvernement. Cette déclaration peut apparaître comme une stratégie politique pour apaiser les relations avec la Chine. Celle-ci revendique le droit de nommer le prochain dalaï-lama, en tant que chef politique. La mission spirituelle pourrait être, pour l’actuel dalaï-lama, exercée par de jeunes moines du bouddhisme tibétain.

Alors que les médecins lui prédisent une vie de centenaire, Tenzin Gyatso prévoit de vivre exactement jusqu’à 113 ans. Pourrait-il finir sa vie de retour dans ses terres natales ?

Le dalaï-lama en conférence à l’Université du Michigan en 2008 (crédit : Université du Michigan)
Le dalaï-lama en conférence à l’Université du Michigan en 2008 (crédit : Université du Michigan)

Un jour, vous apprendrez que le dalaï-lama est décédé, mais je reviendrai, même si l’institution du dalaï-lama n’est plus reconnue. Je serai de retour

Tenzin Gyatso

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Article concocté par Alexandra Monet ,

Passionnée d’Histoire et de patrimoine, j’ai eu la chance de commencer ma carrière entre les colonnes de Notre-Dame de Paris, et de la poursuivre sur les pas de Madame de Maintenon et de Simone Veil. Je n’en oublie pas la musique, pratiquant guitare et piano, chantant cantiques et airs d'opéra, à qui veut bien m’écouter.

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